Outils pratiques et questions importantes pour aider vos étudiant·e·s à apprendre en groupe.
Une initiative de l'Institut Mines-Télécom avec un réseau de partenaires
Outils pratiques et questions importantes pour aider vos étudiant·e·s à apprendre en groupe.
Le tournant semble avoir été pris il y a cinquantaine d’années environ en France : l’enseignement supérieur a vu se développer en son sein un certain nombre de disciplines correspondant à des champs de pratiques professionnelles : sciences de l’ingénieur, ergonomie, gestion, santé, éducation, information et communication, travail social, activité physique et sportive, par exemple. Ces disciplines de « transformation du monde » sont souvent en relation ambiguë sinon difficile avec les disciplines « classiques » correspondant, elles, davantage à des objets-états du monde (le physique, le vivant, la terre, le collectif, l’individuel, etc.), et n’ont pas le même statut épistémologique et social.
La scène sociale des débats pédagogiques voit régulièrement s’affronter les tenants de deux types de modèles (Sciences humaines n°307 oct. 2018) :
Ces deux figures ne sont probablement que la reprise en éducation et formation du clivage objet/sujet accompagnant deux perspectives socialement marquées du développement humain : l’une prône l’adaptation aux exigences de fonctionnement des organisations, l’autre mise sur les potentialités, les aspirations, les attentes, les envies.
La vie sociale offre de multiples situations ou dispositifs où registre de l’analyse et registre de l’évaluation se trouvent confondus.
Au final, ce discours se prolonge dans la surprenante présentation d’interventions professionnelles comme des sciences…
Après les initiatives pionnières il y a une quarantaine d’années de C. Levi-Strauss, de R. Sainsaulieu, et l’organisation d’un important colloque à Toulouse sur « Production et affirmation de l’identité » (1979, P. Tap), la référence identitaire est devenue une sorte de point de passage obligé de bon nombre de travaux de sciences humaines et sociales en France. Elle présente en effet de multiples vertus :
Dans la vie professionnelle, la même référence est devenue un outil privilégié de défense des intérêts des groupes, et de finalisation de leurs dispositifs de formation et de professionnalisation.
L’étoile du berger. L’inflation du vocabulaire du « sens »
C’est devenu un lieu commun du vocabulaire des acteurs qui ambitionnent de réformer sans transformer les rapports sociaux : il conviendrait de « (re)donner du sens » à l’activité, singulièrement dans les domaines qui « font société ». Et l’on voit se multiplier les dispositifs d’accompagnement d’une telle donation de sens : référence à l’éthique, au bien commun, à la durabilité ; célébration des vertus de la pédagogie en politique, de la communication et du soft management dans les organisations ; cellules d’appui psychologique, etc.
La numérisation d’un grand nombre d’activités professionnelles, souvent engagée pour éviter la rémunération du travail, a modifié considérablement la part respective de la production de biens et de la production de services dans l’économie contemporaine, ce qui a eu pour effet paradoxal d’augmenter l’importance des interactions humaines dans un domaine réputé en pointe sur le plan technologique.
Produire un service suppose en effet obligatoirement la combinaison au moins deux types d’activité : celle du « producteur » et celle de l’« usager ».
Reprenant sans le savoir une habitude de pensée de la culture occidentale, les sciences humaines et sociales contemporaines tendent en majorité à proposer une vision séparée, sinon opposée de la vie émotionnelle des sujets et de leurs actions sur le monde.
Les disciplines académiques par exemple se sont constituées d’une part en disciplines cliniques ou de la subjectivité, d’autre part en disciplines de l’activité (Rochex, 1995) ou du comportement, notamment cognitif.
Les débats publics en matière d’éducation et plus généralement dans les « métiers de l’humain » butent souvent sur l’imprécision et la polysémie du vocabulaire de base utilisé.
Ces glissements sémantiques ne sont pas de simples approximations ou erreurs. Ils jouent des fonctions sociales.
Dans la mouvance sémantique de la dichotomie théorie/pratique, le terme « concept » valorise socialement ce qu’il nomme, par différenciation avec ce qui lui est opposé ou ce qu’il ignore.
Ainsi, dans le langage académique, il est souvent opposé au terme notion. L’un et l’autre désignent certes une idée générale ou abstraite, mais le concept est considéré comme lié à un discours théorique, alors que la notion est, elle, considérée comme induite ou déduite d’une expérience, d’un vécu, d’un rapport d’ activité empirique.