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Anne-Pia, étudiante : « Je veux que mes études m’engagent »

Un article repris de http://theconversation.com/anne-pia...

Congrès des étudiants à Sciences Po, AIESEC 2013 Jakub Szypulka, CC BY

Le 22 décembre 2015, The Conversation publiait « Pourquoi dois-je aller à l’école ? », texte de Zoé, une lycéenne révoltée, désireuse de changer le système éducatif scolaire. Aujourd’hui, Anne-Pia Marty, étudiante engagée, en licence, poursuit le débat au sein de l’université, un lieu dont les étudiants doivent s’emparer pour prendre leur place dans le monde.

En septembre dernier, l’Organisation des Nations Unies (ONU) a fait part des objectifs de développement durable que nous devons collectivement atteindre pour 2030. Ces objectifs sont aussi variés que liés les uns aux autres. Ils parlent d’environnement, d’éducation, de santé, de paix, de justice et d’égalité.

Il ne nous reste que 14 ans d’ici à 2030.

Si nous voulons atteindre ces objectifs dans les temps, il faut changer radicalement la manière dont nous formons la génération qui s’attaquera (et s’attaque déjà) à ces problèmes.

Notre imaginaire des métiers et du travail est déjà obsolète, et beaucoup des métiers que nous exercerons dans 10 ans n’existent pas encore.

Alors pourquoi l’éducation, et en particulier l’éducation universitaire n’évolue-t-elle pas plus vite ? Pourquoi les cours en amphithéâtre sont-ils majoritairement les mêmes aujourd’hui qu’au Siècle des Lumières ?
Nous nous contentons de modèles s’appliquant à un monde qui a cessé d’exister, en espérant que cela suffira pour faire des étudiants actuels une génération d’acteurs du changement. Cela ne suffit plus.

Les problèmes auxquels nous faisons face sont complexes, interconnectés, interdisciplinaires et internationaux. Or, l’éducation nationale, disciplinaire, fractionnée, théorique, que nous proposent nos écoles et nos universités n’est plus à la hauteur.

Si nous voulons former une génération adaptée au monde tel qu’il est aujourd’hui, il faut nous laisser nous confronter à ce monde. Laissez-nous apprendre sur le terrain autant qu’on apprend dans les livres. Donnez-nous l’occasion de nous engager.

Je ne dis pas que nous ne le sommes pas. Bien au contraire. D’après un sondage réalisé par AIESEC, 56 % des étudiants dans le monde sont déjà engagés, mais trop souvent, c’est une initiative individuelle. On s’engage en parallèle si ce n’est au détriment de ses études. Combien d’étudiants doivent choisir entre leur engagement et leurs résultats scolaires ? Combien ne peuvent pas donner de leur temps pour ce qui leur tient à cœur car ils doivent réviser leurs examens ou travailler pour pouvoir même bénéficier d’une éducation supérieure ?

Et qu’en est-il des 44 % restants ?

Ne serait-ce qu’au cours de l’année passée, nous avons vu notre monde changer radicalement : les attentats en Europe et au Moyen-Orient, la tentative de coup d’État en Turquie, la montée des populismes, le Brexit, sont autant de phénomènes qui nous ont désemparés, sans parler du dérèglement climatique, de l’islamophobie, de la crise des réfugiés.

Or ces 44 % ne sont pas inactifs et surtout pas je-m’en-foutistes : ils sont dépassés. Ils se sentent impuissants et frustrés. Ils ont envie de s’engager, mais ne savent pas où, ne savent pas comment. Ils n’ont pas l’impression d’avoir voix au chapitre et se sentent paralysés.

Alors pourquoi l’Université n’est-elle pas un lieu d’engagement ? C’est pourtant un lieu de rassemblement et d’apprentissage. Si l’engagement nous permet de nous confronter au monde dans sa complexité ; si nous engager nous motive au point d’y passer nos temps libres, nos week-ends et nos soirées, si nous pouvons appliquer nos connaissances théoriques et nos savoir-faire à ce qui nous passionne et nous mobilise, pourquoi le monde académique est-il si hermétique à l’engagement ? Pourquoi refuser aux étudiants la chance de s’épanouir en produisant des résultats positifs et concrets ? Pourquoi l’université n’est-elle pas plus intégrée dans la société ?

Il est grand temps de fusionner ces deux mondes.

Il est temps d’ouvrir le dialogue entre universités, étudiants et organisations pour réinventer ensemble la formation et l’action dans ce monde où tout reste à faire. Il est temps d’impliquer tous ceux qui ne le sont pas encore dans des actions plus communes. De sortir du cadre strictement national pour s’engager sur des projets qui nécessitent la collaboration d’étudiants et d’universités de par le monde. De mettre à la disposition des étudiants non pas seulement les ressources de leur propre université, mais celles d’un ensemble d’établissements dans le monde entier.

Ce n’est pas le moment de réinventer la roue. Je ne parle pas de créer une nième association étudiante, mais d’impliquer celles qui existent et qui font déjà un travail admirable vers une action commune, plus concertée et plus globale. Je parle de rassembler les initiatives semblables, mais surtout complémentaires pour aller plus loin ensemble. Je parle de permettre aux étudiants d’être reconnus par leurs universités pour ce qu’ils font, et d’inscrire une approche pratique dans le cadre théorique que les universités offrent déjà.

Je parle d’utiliser l’énergie de ceux qui veulent changer le monde pour changer d’échelle et apprendre les uns des autres parce que nous voulons tous changer le monde et que grâce à Internet, rien n’est plus facile d’accès que l’information, rien n’est plus simple que de former des réseaux. Nous ne sommes plus seuls. Nous sommes des millions.

Alors, travaillons ensemble. Proposons aux universités de donner des crédits « engagement » ou même carrément des diplômes d’acteurs du changement, de nous faire travailler sur des problèmes réels plutôt que sur des cas théoriques. Il faut nous laisser nous approprier les campus, pour qu’ils soient durables et sociaux, qu’ils deviennent les lieux où l’on construit l’avenir.

Travaillons avec les organisations non gouvernementales qui ont une vision globale des problèmes à résoudre pour qu’elles nous donnent des défis, et que nous leur proposions des solutions.
Utilisons les universités pour ce qu’elles devraient être : des laboratoires de l’innovation, de l’engagement, de l’action commune. Rassemblons les mouvements étudiants dans un effort global. Nous avons les outils pour le faire, ils s’appellent Facebook, Twitter ou Wechat. Ils s’appellent AIESEC, Animafac ou REFEDD.

C’est le moment d’ouvrir le dialogue et d’élaborer ensemble un plan d’action commun. C’est le moment d’inclure ceux qui se sentent impuissants et frustrés, ceux qui sont paralysés par la peur de l’échec ou qui ne savent pas comment commencer ; pour que notre génération soit celle de l’intelligence collective. C’est le moment d’agir ensemble pour créer le monde dans lequel nous voulons vivre.

Alors qu’est-ce qu’on attend ?

Les étudiants intéressés et motivés peuvent écrire à Anne-Pia à students4sdg@gmail.com.

The Conversation

François Taddei est directeur du CRI, qui est un partenaire de The Conversation France.

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