Le 18 octobre 2021, nous avons eu le plaisir d’apprendre que notre Chaire UNESCO est reconduite pour 4 ans ! Ce premier accord a été signé le 28 avril 2017 entre l’UNESCO et l’Université de Nantes et c’est toi, Colin, qui es titulaire de la Chaire depuis sa création.
Tout d’abord, peux-tu en dire plus sur les raisons qui sont à l’origine de ton choix de prise de fonction il y a 4 ans ?
D’abord, je veux exprimer ma grande fierté, que je sais partagée par toutes celles et tous ceux qui ont travaillé au sein de cette chaire pendant ces 4 dernières années : le renouvellement d’une Chaire UNESCO, ce n’est pas si simple. Il fallait à la fois faire approuver un bilan et convaincre avec un nouveau projet.
Mais tu as raison, commençons par revenir 4/5 ans en arrière. Je travaillais déjà avec l’UNESCO de façon ponctuelle sur des sujets communs, en particulier la question des ressources éducatives libres. Et nous avions, avec INRIA et Magic Makers, lancé en 2015 le projet Class’Code qui reposait déjà sur l’idée que toutes les ressources créées seraient partagées librement. Il semblait donc possible d’utiliser Class’Code comme modèle plus général pour la question de la formation des enseignants, en particulier sur des sujets nouveaux.
C’est cette idée qui figurait dans le projet soumis à l’UNESCO et approuvé en 2017.
Ensuite, pour différentes raisons, nous avons exploré le rôle de l’Intelligence artificielle dans la mise en œuvre de ces technologies. Et les liens entre éducation et IA sont devenus, petit à petit, fondamentaux : il fallait donc travailler là-dessus ! Et cela justifiait la demande d’une nouvelle Chaire.
Suite à cette nouvelle, quels sont tes ressentis concernant les 4 premières années, comparativement aux résultats escomptés ?
Les résultats ont été bien au-delà de nos espérances. Le projet européen X5-GON a permis d’explorer ce qu’il était possible de faire pour les RELs avec l’Intelligence artificielle. Au-delà, le travail en réseau avec la fondation Knowledge for All nous a fait rencontrer de nombreux acteurs. La question des RELs a pris de l’importance avec, concrètement, l’adoption par l’Assemblée générale de l’UNESCO, en septembre 2019, de sa recommandation. Le travail de préparation de cette recommandation a rythmé celui de la Chaire. J’ai en particulier le souvenir d’une session intergouvernementale, en mai 2019 à l’UNESCO, où il s’est agi de converger sur le texte qui allait être adopté à l’unanimité quelques mois plus tard. J’étais rapporteur lors de ce travail.
Et pour les 4 ans à venir, tes ambitions initiales ont-elles évolué ?
Oui, les ambitions de 2021 ne sont pas celles de 2017. Le sujet de l’IA est devenu colossalement important. Pour l’UNESCO, la question de l’éthique est centrale, et comme l’UNESCO s’intéresse à l’éducation, on va nécessairement s’intéresser à l’éducation et l’Intelligence artificielle. Et nous avons là le devoir d’être ambitieux. En collaboration étroite avec IRCAI (le Centre International de Recherche en Intelligence Artificielle, soutenu par l’UNESCO), nous allons explorer toutes ces questions.
À l’occasion de ce renouvellement, l’UNESCO a accepté la demande de modification du nom de la Chaire : initialement « Chaire UNESCO en technologies pour la formation des enseignants par les ressources éducatives libres », l’intitulé sera dorénavant « Chaire UNESCO en Ressources Éducatives Libres et Intelligence Artificielle ».
Quelles sont les raisons de ce changement ?
Et dans quelle mesure cela aura-t-il une influence sur les objectifs et les enjeux de la Chaire durant les 4 prochaines années ?
Les raisons du changement résident dans l’agenda même de l’UNESCO. Aujourd’hui, l’IA est devenu un sujet essentiel pour l’UNESCO. C’est un sujet complexe. Techniquement, bien entendu. Mais étant donné son impact économique, il est difficile d’obtenir des arbitrages avant que la machine ne s’emballe. C’est là que l’UNESCO a un rôle à jouer.
En novembre 2021, à Paris, c’est cette fois une recommandation sur l’IA et l’éthique qui a été discutée -et adoptée- par l’Assemblée générale de l’UNESCO.
Ce qui est au centre de nos travaux est la question des liens entre Intelligence artificielle et Éducation ouverte. Avec des liens dans les deux sens.
Dans la lettre adressée par Monsieur Sobhi Tawil (Directeur, Futur de l’éducation et innovation, UNESCO), plusieurs points forts de la Chaire ont été mis en évidence, tels que la conformité de nos activités avec l’Objectif de développement durable 4, les priorités de la Stratégie à moyen terme 2015-2021 de l’UNESCO et le programme prioritaire du Secteur de l’éducation sur les enseignants.
La pertinence de la Chaire dans le contexte du programme phare « la Coalition mondiale pour l’éducation », notamment dans le cadre du Campus des enseignants, a également été soulignée.
Peux-tu donner davantage de détails à ce sujet ?
Ce qui est passionnant avec l’UNESCO est qu’on cesse de regarder notre nombril. La question de l’éducation est à la fois globale et traitée de façon très différente entre les continents et à l’intérieur de ceux-ci. Parler éducation avec des collègues des autres pays -et surtout des pays qu’on n’a pas l’habitude de trouver dans nos colloques internationaux “riches”- est une expérience très enrichissante. Des évidences cessent de l’être et il est nécessaire de réexaminer toutes nos hypothèses. Ainsi, la question de l’IA dans l’éducation a un sens partout, mais les obstacles ne seront pas les mêmes partout. Les besoins non plus.
Nous avons la chance d’être à l’intersection de deux questions essentielles. Enfin…de la chance ? Peut-être faut-il formuler cela autrement. C’est aussi une énorme responsabilité.
L’UNESCO a par ailleurs souligné notre contribution “au renforcement des capacités institutionnelles et à l’innovation des méthodes pédagogiques” .
Selon toi, quelles ont été les contributions majeures de la Chaire concernant cet axe ?
Et quelles sont les perspectives pour 2021-2025 ?
C’est une question à laquelle il faudra répondre avec beaucoup de modestie. Il me semble que les progrès accomplis dans le contexte du projet X5-GON sont intéressants. Techniquement, nous avons aujourd’hui une belle base de Ressources Éducatives Libres. Nous avons aussi développé des interfaces pour y accéder. Le travail n’est pas terminé et je sais qu’IRCAI va continuer à développer ce projet. Et j’espère que nous aussi allons continuer à contribuer, en particulier du côté des ressources francophones.
Mais au-delà des résultats directs, il y a eu des retombées indirectes : les enjeux de maintenir de grandes collections de RELs, la question des licences et d’une approche parfois trop flexible concernant celles-ci, la nécessité de solutions réellement multilingues sont autant de sujets que nous avons contribué à mettre sur la table.
Je crois aussi que le travail que nous avons mené sur l’éducation à l’IA va nous servir de point de départ à d’autres projets, d’autres collaborations.
Enfin, sur la question des RELs, la Chaire a été associée au travail menant à l’adoption de la recommandation votée par l’Assemblée générale de l’UNESCO en 2021.
Tu me demandes quelles sont les perspectives pour 2021-2025. Nous avons établi une feuille de route dans le dossier soumis à l’UNESCO. Mais l’accélération forte impulsée par la Présidence de l’Université de Nantes, en faveur d’une Université ouverte, peut nous amener vers de nouvelles ambitions.
Au cours des 4 dernières années, le nombre d’universitaires, de chercheurs et de partenaires ayant contribué aux projets de la Chaire est considérable. Selon Monsieur Sobhi Tawil, cela enrichit la coopération entre la Chaire et le Ministère de l’Éducation Nationale.
À ce sujet, quels sont les objectifs de la Chaire en vue d’amplifier cette coopération ?
Quels sont les principaux axes d’amélioration ?
Nous travaillons pour et avec l’Éducation nationale depuis 2015. D’abord avec le projet Class’Code qui est aujourd’hui un objet incontournable dans le paysage de la formation des enseignants. Si l’objectif premier de Class’Code était la formation au code et à la pensée informatique, l’émergence de l’Intelligence artificielle a multiplié les terrains sur lesquels Class’Code peut s’exprimer.
En 2020, nous avons été retenus pour animer un GTnum (Groupe Thématique Numérique) sur ces questions. Là aussi des coopérations.
Nos activités de médiation vont dans le même sens : être présents -par exemple lors de la prochaine Nuit Blanche des Chercheurs– avec d’autres que des Universitaires, c’est essentiel.
Enfin, l’UNESCO nous encourage vivement à renforcer notre coopération avec d’autres Chaires UNESCO et des universités au niveau international.
Concernant cet enjeu, comment envisages-tu l’avenir ?
Oui, bien entendu. La collaboration internationale est un enjeu majeur. Nous travaillons déjà avec des équipes en Inde, Slovénie, Afrique du Sud, Italie, Espagne, au Luxembourg, au Royaume-Uni, au Portugal, au Canada… Les deux thèmes sont à la fois globaux et locaux. C’est bien sous ces deux angles qu’il faut continuer à les voir.
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