Cet article est présenté au collloque QPES 2025 Ecosystémes de formation pour quelle(s) transformation(s) du 19 au 23 mai Brest, dont les actes sont publiés sous licence CC by sa nc. Il est présenté lors de la session "La transition autrement : nouveaux dispositifs pédagogiques pour enseigner les enjeux environnementaux"}
par Frédéric Bouquet, Julien Bobroff, Lou-Andreas Etienne, Carla Vardon, Université Paris-Saclay, Lindsey Paek, Institut Villebon - Georges Charpak
1. Introduction
L’enseignement supérieur ne peut pas ignorer la crise environnementale à laquelle les jeunes générations seront bien plus exposées que les moins jeunes (Boecker et al, 2016 ; Forinash, 2016). Dans ce contexte, il devient crucial de repenser l’enseignement pour encourager les étudiants à prendre conscience de leur place dans l’environnement, tant dans une perspective écologique que citoyenne.
D’un point de vue disciplinaire, la physique offre plusieurs approches possibles (Boecker et al, 2003 ; Busch, 2013 ; Kimori et Roehrig, 2021), la plus évidente pour un niveau licence étant la notion d’énergie. Cette notion existe déjà dans les cursus à ce niveau, principalement dans les cours de mécanique et de thermodynamique, et permet d’aborder différents aspects importants pour la transition écologique : les différentes sources d’énergies (électriques ou autre), la notion de rendement, ou la notion d’effet de serre par exemple. Plusieurs cours, théoriques ou expérimentaux, se sont développés dans ce sens ces dernières années sur ces notions (Blankert et Mulder, 2003 ; Martinuk et al, 2010 ; Forinash et Whitten, 2019).
Or, au-delà de questionner les concepts scientifiques, il est essentiel de mettre en valeur les interactions sociales et environnementales des étudiants au sein de ces enseignements. Favoriser l’interaction entre les étudiants, leur environnement naturel, et l’équipe enseignante pourrait s’avérer efficace, en enrichissant leur réflexivité. L’objectif est de créer un écosystème d’apprentissage dans lequel les étudiants ne sont pas seulement des observateurs passifs des phénomènes physiques, mais des acteurs engagés dans une dynamique collective, tant sociale qu’environnementale.
Dans cette optique, le workshop international « Reimagine Physics Teaching » de mai 2022 (Bobroff, 2022) a réuni des enseignants pour réfléchir à des manières innovantes d’enseigner la physique et de réfléchir aux évolutions possibles. Il a facilité une réflexion collective autour de la problématique d’un nouvel enseignement se déroulant en grande partie en forêt et proposant aux étudiants de regarder la forêt avec l’œil du physicien, où les étudiants sont invités à observer leur environnement avec l’œil du physicien et à interagir avec lui d’une manière qui questionne leur place dans un milieu naturel (Vest et al, 2023 ; Workshop Reimagine Physics Teaching, 2022).
À partir de cette trame nous avons mis en place un enseignement qui se déroule en grande partie en forêt, en mettant l’accent sur la réflexion personnelle, ainsi que la collaboration à travers la création collective.
2. Description de l’enseignement
Le module, représentant 2 ECTS, est suivi depuis septembre 2022 par tous les étudiants de double licence physique / géologie de l’Université Paris-Saclay. Il se déroule une année sur deux, en tout début d’année universitaire, en regroupant les deux dernières années de ce cursus (L2 et L3), entre 15 et 20 étudiants.
En deux jours pleins, les étudiants mènent des projets collaboratifs de physique, en forêt et liée à la forêt, en participant activement à la conception, l’analyse, et la présentation de leurs résultats dans un format original. Ces projets visent non seulement à renforcer leur compréhension scientifique, mais aussi à nourrir leur réflexion sur les enjeux écologiques, leur citoyenneté, et leur place dans l’environnement global.
2.1. Objectif de l’enseignement
L’objectif de l’enseignement est de rendre concret l’intérêt de la physique pour comprendre le monde autour de nous, en dehors du cadre un peu artificiel d’un montage de TP, afin de préparer les étudiants à appliquer leurs savoirs à des situations réelles. Les objectifs sont qu’à la fin de l’enseignement les étudiants soient capables de :
- observer leur environnement avec un regard scientifique ;
- organiser et documenter leurs observations ;
- définir une question scientifique à partir de leurs observations ;
- identifier les quantités physiques pertinentes ;
- concevoir et réaliser une étude pour répondre à la question scientifique, analyser ses résultats ;
- communiquer à des pairs le processus et le résultat de cette étude ;
- identifier des questions restant ouvertes ;
- s’interroger sur leur place dans l’environnement.
Ces objectifs visent des compétences méthodologiques plus que disciplinaires. L’apprentissage par projet est une façon reconnue pour travailler la démarche expérimentale (Blumenfeld et al, 1991 ; Reverdy, 2013). Cet enseignement s’inscrit dans ce cadre, avec pour caractéristique un travail sur un temps court, et en groupe.
Cet enseignement comporte également des objectifs liés à des compétences transverses, de travail de groupe, de partage et transmission de connaissance, de créativité, et de plaisir lié à la physique. Ces compétences sont essentielles pour encourager les étudiants à interagir avec leur environnement de manière plus systémique et collaborative, dans le cadre d’un écosystème d’apprentissage (Boecker et al, 2003). Les étudiants sont amenés à observer des phénomènes physiques directement liés à leur environnement, à analyser leurs impacts écologiques, et à réfléchir à leur propre place dans cet écosystème.
En favorisant l’interaction avec le milieu naturel, l’enseignement relie la théorie physique à la réalité écologique, un point clé pour sensibiliser à la crise environnementale. L’objectif est de ne pas se limiter à l’enseignement de la physique, mais de former des citoyens conscients des enjeux écologiques mondiaux et leur propre rôle en tant qu’acteurs dans l’écosystème global.
2.2. La première journée, « comprendre la forêt »
Un point marquant de cette journée est qu’elle se déroule en partie en forêt, accessible à quelques minutes de marche du bâtiment d’enseignement qui est également utilisé. Cette immersion en forêt commence dès le début de l’enseignement : la première activité qui leur est demandée est de prendre le pouls de la forêt. Pendant 15 minutes, les étudiants doivent s’y promener, individuellement et en silence, avec pour seule consigne de revenir au point de rendez-vous extérieur avec un souvenir : un objet ramassé dans la forêt, qui leur parle. Cette activité donne le temps aux étudiants de découvrir la forêt et marque une rupture forte par rapport aux cours auxquels ils sont habitués.
Les enseignants explicitent alors les objectifs de l’enseignement, ainsi que les différentes activités qui seront menées. Cette explication se fait dans la forêt, sans moyen numérique. Les étudiants doivent ensuite concevoir eux-mêmes des idées de projets de physique liés à la forêt. La notion de projet de physique lié à la forêt est vaste (mesurer une propriété, tester une loi de physique ou une loi d’échelle, fabriquer une expérience, etc.) ce qui assure un grand nombre potentiel de projets. Pour cette activité, les étudiants travaillent en binôme, tirent trois contraintes aléatoirement parmi une liste (par exemple : rapide, minuscule, ciel, éphémère, etc.) et réfléchissent à des projets autour de ces contraintes. Ces contraintes servent à guider leur réflexion, mais ne sont pas conçues pour les brider : toutes les idées de projets sont acceptées.
Un rendez-vous est fixé dans le bâtiment. Là, ils vont tous ensemble rassembler leurs idées de projets. Les enseignants aident à synthétiser les propositions et à vérifier que les projets sont conformes aux consignes.

Figure 1 : les étudiants cherchent des idées de projet en fonction des contraintes qu’ils ont tirées.
Les étudiants s’organisent ensuite en petit groupes de deux à trois étudiants, chaque groupe choisissant un projet qu’il doit alors mener. Pour réaliser leur projet, les étudiants disposent d’un temps réduit (3 heures 30) et de matériel frugal de mesure : leur smartphone, des cordes, des règles, des mètres mesureurs. Du matériel spécifique a été rajouté pour répondre au choix des projets (par exemple une enceinte portable pour une étude d’atténuation du son). Les étudiants mènent leurs mesures en autonomie dans la forêt (après avoir laissé leur numéro de téléphone aux enseignants) et peuvent revenir dans le bâtiment pour analyser leurs données. Les encadrants vérifient régulièrement que les groupes ne rencontrent pas de problèmes et échangent régulièrement avec eux.

Figure 2 : les étudiants mènent une étude de débit de rivière.
À la fin de la journée, les études doivent être terminées et analysées, et la journée se termine par une présentation pendant laquelle chaque groupe présente aux autres ses résultats. Une description plus poussée de la physique qui peut être menée en forêt a été présentée par Bouquet et al. (2023a).
2.3. La deuxième journée, « raconter la forêt »
La deuxième journée est consacrée à la restitution des projets. Lors de la première édition de septembre 2022, les étudiants ont conçu et fabriqué une exposition collective, qui a été visitée en milieu d’après-midi par des étudiants et enseignants n’ayant pas participé à l’enseignement. En pratique, cela veut dire concevoir la scénographie pour occuper l’espace (deux grandes salles du bâtiment), les supports et différents stands qui présenteront les projets, et la scénographie et le message pour donner une unité à l’exposition. Cette journée regroupe des enjeux de vulgarisation (expliquer leurs résultats à un grand public), de travail en équipe (la scénographie doit être décidée et validée par l’ensemble du groupe), de créativité (concevoir et fabriquer l’exposition).
Le début de la matinée fournit aux étudiants des outils pour cela. La journée commence par une visite d’une salle d’inspiration : une salle aménagée afin de présenter aux étudiants toute une série de références, à la fois scientifiques (livres et articles sur la forêt) mais également des références de design, d’art, de bricolage, afin d’inspirer les étudiants dans la conception de leur exposition et de les inciter à explorer des façons d’interagir avec le public : maquette, objet interactif, stand avec médiateur, quiz, etc.
Pour cet enseignement, les étudiants se sont mis d’accord pour une scénographie autour du thème « la forêt mécanique », et ont organisé leurs différents projets en un parcours cohérent pour les visiteurs. Vers le milieu de l’après-midi, l’exposition est ouverte et est visitée par des enseignants et étudiants n’ayant pas participé à l’enseignement. Les créateurs de l’exposition assurent la visite et animent certains stands.
La dernière heure de la journée est consacrée au débriefing, permettant un retour des étudiants sur l’enseignement, ainsi qu’un retour des enseignants sur le travail des étudiants. Lors de la deuxième édition de septembre 2024, les étudiants ont présenté leurs résultats sous la forme de publications sur un réseau social, Instagram. La journée a commencé par une présentation des différents formats de publications possibles (photos, films, quiz, story, sondages, lien, etc.) et des contraintes associées. Les étudiants ont ensuite construit du contenu et alimenté un compte collectif créé pour l’occasion à partir de leur travail de la veille. Avant le débriefing, tous les enseignants et étudiants se sont réunis pour parcourir les publications de ce compte, en utilisant un smartphone connecté à un vidéoprojecteur. Ce format a l’avantage d’être moins contraignant en termes de matériel, mais enlève aux étudiants le contact avec le public qui avait été un temps fort de la première édition.

Figure 3 : l’exposition, visitée par des étudiants et enseignants extérieurs à l’enseignement.
2.4. Évaluation
Les enseignants ont fait plusieurs retours aux différentes équipes en proposant des pistes ou des améliorations aux différentes étapes des projets. En revanche les étudiants n’ont pas reçu de note pour cet enseignement, ni individuellement, ni en groupe. Cette absence de note n’a pas amoindri la participation des étudiants, qui ont tous activement participé à cet enseignement. C’est une pratique que nous avions déjà testée dans d’autres enseignements qui travaillent les compétences (Bouquet et al., 2023b).
3. Impact sur les étudiants
L’évaluation de l’impact de cet enseignement sur les étudiants se fait par le biais d’une enquête par questionnaire et d’un débriefing à la fin du module. Le questionnaire de la première édition envoyé aux étudiants en septembre 2022, comportait des questions quantitatives sur une échelle de Likert de 1 à 7, ainsi que des questions ouvertes permettant de recueillir des retours qualitatifs. Ce questionnaire a été répondu par 9 étudiants sur les 16 participants de cette année- là (12 en L2 et 4 en L3). En complément de cette enquête, un débriefing d’une heure a été organisé à la fin de la deuxième journée, auquel tous les étudiants et enseignants ont participé, offrant ainsi un espace pour discuter et réfléchir sur l’expérience d’apprentissage vécue.
Pour la plupart, ces retours leur permettent de prendre conscience de leur position par rapport à l’environnement et de réfléchir à la manière dont leur engagement dans des problématiques scientifiques peut élargir leur perspective. L’interaction entre les étudiants et les enseignants, ainsi qu’entre les étudiants eux-mêmes, contribue également à la construction d’un environnement d’apprentissage collectif qui reflète les dynamiques des écosystèmes réels.
Comme souvent lors d’un enseignement original (Hattie, 2012), ce questionnaire a révélé un retour généralement positif de la part des étudiants. La moyenne de leurs réponses à la question du questionnaire « Qu’avez-vous pensé de cet enseignement ? » est de 6,1 (médiane : 6), et les verbatims lors du débriefing ou des questions ouvertes sont positifs comme suit :
« un autre point de vue sur les équations et la physique » ;
« Du bien-être » ;
« Satisfaction d’avoir pu effectuer de A à Z un projet scientifique » ;
« on est complètement immergé dans une expérience sociale et scientifique et ça fait du
bien ! » ;« J’ai vraiment adoré. ».
Au niveau des apprentissages disciplinaires, à la question « Avez-vous le sentiment d’avoir plus ou moins appris que lors d’un TP classique à nombre d’heures égales ? », la moyenne des réponses est de 4,6 (médiane : 4). Autrement dit, les étudiants estiment avoir à peu près autant appris qu’un TP classique. Lors du débriefing, les étudiants ont mentionné qu’ils n’avaient pas vraiment eu le temps d’améliorer leurs connaissances théoriques, qui auraient pu les aider.
On peut retrouver plusieurs thèmes dans le débriefing et dans les réponses ouvertes des étudiants :
- le travail de groupe (« s’organiser en équipe » « le travail en groupe peut être très efficace en s’organisant »)
- la liberté et l’autonomie (« La liberté qu’on avait » « choisir nous-mêmes le thème sur lequel on veut travailler, et de monter nous-mêmes nos expériences. »)
- le lien entre la théorie et le réel (« Les sciences sont partout, il faut juste faire un petit effort pour les remarquer. » « un autre point de vue sur les équations et la physique » « La science n’est pas que des calculs longs et incompréhensibles »)
- le temps contraint (« Les contraintes de temps. […] c’était une montée d’adrénaline. Ça nous obligeait à travailler vite (dans un bon sens) » « stress pour finir la maquette et l’exposition »)
- le côté frugal des outils mis à leur disposition (« on peut accomplir beaucoup plus qu’on ne le pense avec peu de matériel » « il n’y a pas besoin de matériel très sophistiqué pour faire des sciences »)
- le plaisir d’être en forêt (« Être dehors et regarder la nature par la physique » « Raconter la forêt » « Plus de forêt »)
4. Discussion
Les retours que nous avons recueillis des étudiants sur le travail de groupe, l’autonomie, le lien entre la théorie et le réel sont des retours que nous retrouvons régulièrement dans d’autres enseignements par projets (Bouquet et al., 2017), et ces sujets font partie de ceux pour lesquels ce type d’apprentissage est connu pour avoir un effet fort (Blumenfeld et al, 1991 ; Reverdy, 2013). Il n’est donc pas étonnant de les retrouver ici, mais on peut noter que la notion de travail de roupe est l’un des thèmes qui est revenu le plus souvent dans les réponses des étudiants.
Le thème lié à la frugalité du matériel disponible revient également assez souvent, et de manière positive. On pouvait craindre que le côté frugal puisse rebuter les étudiants, par rapport aux mesures très précises qu’ils effectuent par ailleurs dans le cadre de TP en salle ; cela ne semble pas avoir été le cas. Le fait que le focus de l’enseignement soit sur le processus (comment faire une étude de physique dans des conditions réelles) plus que sur la précision des résultats justifie ce côté frugal et assure aux étudiants une certaine liberté qu’ils n’auraient pas forcément avec des instruments plus précis, mais plus fragiles et coûteux (Bouquet, 2017).
Par rapport aux objectifs choisis, la plupart sont atteints mécaniquement par la construction de l’enseignement (« observer », « concevoir une expérience », « analyser », etc.). Les réponses des étudiants montrent notamment que les objectifs de travail collaboratifs et de plaisir à faire de la physique sont présents. On peut s’interroger sur le dernier objectif, que les étudiants soient capables « s’interroger sur leur place dans l’environnement ». Ce thème n’apparaît pas directement dans leurs réponses. De manière tangentielle, les étudiants mentionnent leur plaisir d’avoir travaillé en forêt, et le sens que cela donne à leurs connaissances en physique, mais ce n’est pas exactement la même chose. C’est finalement l’exposition qu’ils ont construite, en présentant la notion de forêt dans la ville (à travers des mesures acoustiques), qui indique clairement que cette dimension a été ressentie par les étudiants.
Cette utilisation de la forêt comme lieu d’enseignement d’une discipline non-directement liée à la forêt n’est pas pratiquée au niveau universitaire, à notre connaissance. Les enseignements qui existent sont soit directement orientés vers la forêt (gestion, exploitation de la forêt), soit utilisent la forêt comme un terrain d’étude du vivant (en biologie, écologie). Notre utilisation de la forêt ici est finalement plus proche du mouvement de l’école à la forêt qui est surtout développé au niveau de l’école maternelle et primaire, notamment dans les pays scandinaves ou en Grande Bretagne (Lindemann-Matthies et Knecht, 2011 ; Slade et al, 2013). Les principaux avantages cités pour cette pratique ne sont pas des connaissances nouvelles qui seraient apprises, mais se situent au niveau d’apprentissage ou d’amélioration de compétences (Harris, 2018). Harris (2018) note aussi que sortir du cadre de la salle de classe permet de proposer un espace d’enseignement neuf qui offre plus de liberté et offre de nouvelles possibilités d’interactions entre enseignants et élèves. Ces résultats sont obtenus pour des classes d’âge plus basses que celles de nos étudiants, mais les points mentionnés ci-dessus semblent être transposables à notre enseignement.
Un dernier thème apparaît dans les réponses ouvertes des étudiant : la présence de moustiques, effectivement nombreux. Malgré un aspect un peu anecdotique, ces réponses pointent un problème dont il faut tenir compte en tant qu’enseignant : contrairement à une salle de classe, enseigner à l’extérieur comporte une part d’imprévu. Par exemple la météo, facteur imprévisible qui peut avoir des conséquences fortes sur l’organisation et le ressenti de la journée. Il est prudent de prévoir à l’avance différents scénarios d’enseignement selon les conditions.
5. Conclusion
Nous avons conçu un enseignement en forêt qui permet de proposer aux étudiants une vision de la physique appliquée au monde réel, tout en favorisant le plaisir de la science dans un cadre naturel. L’approche par projet permet de relier la physique à la réalité écologique, en abordant en parallèle la crise environnementale. L’originalité de cet enseignement réside dans sa dimension immersive, où une partie des activités se déroule en plein air, dans la forêt voisine des bâtiments d’enseignement. Cet enseignement est complémentaire de cours plus orientés vers un contenu lié au changement climatique, mais il apporte une dimension plus sensible et positive. Pour faciliter l’essaimage de ces pratiques, outre l’article qui détaille les projets de physique (Bouquet 2023a), nous avons également mis en ligne les références présentées aux étudiants dans la salle à inspiration et une vidéo qui présente cet enseignement afin qu’elles puissent également inspirer d’autres enseignants (La physique autrement, 2024). Ce format peut s’adapter à différentes contraintes d’enseignement. Nous avons par exemple testé un format sur trois demi-journées non consécutives avec des étudiants de L2 en physique (une demi-journée découverte et brainstorming, une demi-journée mesure et analyse, une demi- journée construction d’un site web qui présente les résultats). Ce format pourrait également être repris et adapté à d’autres disciplines expérimentales, notamment en lien avec le vivant. Nous réfléchissons à faire évoluer notre pratique dans les années qui viennent en introduisant une composante interdisciplinaire, en se rapprochant d’enseignants de chimie, géologie ou d’écologie par exemple. Cette approche pluridisciplinaire permettrait de mieux étudier les problèmes environnementaux (Kimori et Roehrig, 2021), en enrichissant la perception des étudiants de l’interconnexion entre les écosystèmes disciplinaires, afin d’appréhender les enjeux environnementaux de manière plus globale et intégrée.
Remerciements
Nous remercions Fabienne Bernard, Hervé Caps, Marina Carpineti, Joël Chevrier, Francesca Chiodi, Ulysse Delabre, Fun-Man Fung, Jean-Michel Geneveaux, Natacha Krins, Denis Terwagne, Benjamin Vest, et Maëlle Vilbert qui ont participé au groupe de travail qui a réfléchi à cet enseignement. Nous remercions l’ensemble des acteurs de la Chaire de recherche-action sur l’innovation pédagogique de l’Université Paris-Saclay et l’Institut Villebon – Georges Charpak portée par Martin Riopel. Ce travail a bénéficié du soutien de la Chaire « La Physique Autrement » de la fondation Paris-Saclay soutenue par le groupe Air Liquide et le Crédit Agricole – CIB, ainsi qu’un soutien de l’Institut Villebon – Georges Charpak.
Références bibliographiques
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