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L’éducation aux temps du coronavirus

24 mai 2021 Veille 532 visites 0 commentaire

Un article repris de http://www.cahiers-pedagogiques.com...

Cet ouvrage collectif s’annonce comme un « carnet de recherche », pour accéder à une compréhension des enjeux provoqués par la fermeture de l’école due à la pandémie COVID-19. C’est la prescription de « continuité pédagogique » qui est mise à l’étude dans plusieurs contextes de formation.

La thèse centrale dégagée à travers de chacun des articles est que la crise du coronavirus a fait redécouvrir ou mis sous la loupe une intersection entre l’injonction à « la continuité pédagogique » avec les inégalités de conditions matérielles et les différences de socialisation surtout si ces dernières, sont éloignées du monde de la formation (école primaire, secondaire, lycée professionnel et université).

Fabienne Montmasson-Michel, à partir de onze entretiens, a montré comment les enseignants du premier degré des écoles, déclarent avoir pris en charge leur mission, avec beaucoup d’inventivité et une implication au-delà du travail prescrit dans cette « étrange parenthèse pédagogique ». Par la recherche du lien avec les élèves, et du coup des familles, d’un suivi prioritairement individualisé. Cette situation a ouvert une fenêtre large sur les situations et les vies des familles, dans leurs complexités, parfois très impliquées et engagées dans le suivi de leurs enfants et parfois un peu moins équipées techniquement et culturellement pour faire face à la situation d’un travail scolaire à distance. Un rapprochement entre les enseignants et les parents s’est opéré. En ce qui concerne les inspections et les directions scolaires, on observe par endroits des fonctionnements plus ouverts, souples et soutenant les actions des équipes enseignantes. Malgré cela, l’auteur fait « l’hypothèse que le pilotage de l’institution scolaire se centralise et se verticalise plus que jamais et se déconnecte toujours plus du travail concret des enseignants, ce qui ne peut que dégrader encore leurs conditions de travail et affaiblir leur profession » (p.38).

Pour Daniel Thin, les parents déploient de l’énergie et des connaissances à la mesure de leurs possibilités mais pour certains d’entre eux, de vivre sous la surveillance constante « que le travail scolaire soit bien fait » leur fait vivre une certaine honte sociale de ne pas avoir le matériel nécessaire et marque leur sentiment d’incompétence, de ne pas savoir ou de ne pas avoir suffisamment fait.

Etienne Douat et Clémence Michoux mettent en évidence le rôle des conseillers principaux d’éducation : durant cette période, ils sont intervenus massivement comme un soutien très précieux d’abord technique mais plutôt comme « urgentistes invisibles », dans un « travail dans l’ombre ». En faisant le facteur à vélo pour apporter les travaux à faire dans les boites aux lettres des enfants soit en s’investissant intensément avec les familles par de nombreuses conversations téléphoniques pour maintenir le lien, leur travail reste massivement inconnu.

Igor Martinache s’attelle à montrer, à partir d’une quarantaine de professeurs, qui ont témoigné par écrit, comment « la continuité pédagogique » a interrogé et même anticipé les enjeux que la réforme du lycée général peut entrevoir. Cette dernière met en évidence les attentes en termes d’autonomie de choix voire d’exigence de se projeter pour les jeunes. Cette période de confinement « aurait servi comme un banc d’essai » à cette réforme du lycée, en exigeant finalement de la part des élèves une grande autonomie pour s’impliquer et pour étudier.

D’autres chapitres examinent l’enseignement professionnel et l’université. Mathias Millet et Stéphane Vaquero montrent comment les étudiants peuvent ou non se remobiliser pour apprendre dans un enseignement qui a basculé entièrement à distance. Ils ne peuvent plus compter sur l’environnement de travail et sur la socialisation universitaire, c’est-à-dire sur les lieux des études tels connus comme par exemple les bibliothèques et sur les nombreuses relations qu’ils tissent dans cet environnement. La « vie à la fac » leur manque, et surtout la question se pose si « le jeu en vaut la chandelle » de continuer et persévérer dans les études.

Avec cet ouvrage, nous avons accès à une palette de « chantiers » de recherche, qui pourraient continuer au-delà de cette période de crise qui a malheureusement accéléré ou mis en évidence les inégalités de nombreux face aux diverses socialisations, dès les plus petits degrés aux plus grands.

Andreea Capitanescu Benetti

Licence : CC by-nc-nd

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