un texte repris du pad de Faire Ecole Ensemble
Les propos développés dans cette intervention concernent l’école et l’éducation au sens large, et ls propositions formulées concernent aussi l’enseignement supérieur
A - À Propos
Cette intervention s’inscrit dans le cadre des états généraux du numérique pour l’éducation proposés par le Ministère de l’éducation nationale les 3 et 4 novembre 2020.
Les intervenant·es y restituaient notamment, au nom du l’association Faire École Ensemble (FÉE), le travail actuellement mené autour des états généraux du numérique éducatif libre et des communs pédagogiques, rassemblant un collectif hétérogène d’acteurs de l’éducation populaire, de l’éducation nationale, du numérique et des tiers-lieux en intérêt pour la culture du libre et des communs.
Cette intervention s’est déroulée le mercredi 5 novembre entre 9h30 et 10h. Vous retrouverez ci-dessous le texte iniatlement prévu pour l’intervention.
B - Résumé de l’intervention
(voir chapeau)
Propositions
– 1 - Reconnaitre la contribution des enseignants aux communs, qu’ils s’agissent de ressources ou de logiciels libres
– 2 - Participer à la création d’une fabrique des communs pédagogiques
– 3 - Pérenniser et ouvrir apps.education.fr
C - Intervenant·es
Christophe Noullez : Enseignant au collège Louise Michel de Clichy-sous-Bois, où il a fondé le fablab LM . Formateur à la DANE de Créteil, trésorier de l’association Tiers-lieux Edu et membre du conseil collégial de l’association Faire École Ensemble.
Pauline Gourlet : Pauline Gourlet est designer d’interaction, chercheure et enseignante. Elle a fondé le collectif de designers L’Atelier des Chercheurs, qui conçoit des outils libres et travaille avec des partenaires variés (de l’école primaire à l’université, fablabs,maker spaces, théâtres, musées, institutions,…). Sa pratique, qui hybride design et recherche action, s’intéresse aux formes d’organisation émergentes au sein de collectifs à travers des processus participatifs de création et d’appropriation d’artefacts, notamment numériques. Pauline a récemment travaillé aux Nations Unies à New York, après avoir obtenu un doctorat en ergonomie en 2018 à l’Université Paris 8, en partenariat avec l’Ensadlab et The New School, où elle était chercheure invitée de 2017 à 2018. Elle enseigne également régulièrement le design et les méthodologies de recherche en France et à New-York. Elle est membre du conseil collégial de l’association Faire École Ensemble.
D - Texte de l’intervention
Nous sommes très heureux de pouvoir parler de culture du libre et des communs aux États Généraux du Numérique, sujet qui nous est cher, et pas qu’à nous. Nous précisons que, bien que nous ayons plusieurs casquettes, nous parlons tous les deux ici depuis notre appartenance à l’association Faire École Ensemble (FÉE) et de notre participation au collectif des États Généraux du Numérique du libre et des communs qui travaille à des propositions concrètes pour introduire plus largement le libre et les communs dans l’éducation.
1 - Émergence d’un collectif qui se mobilise autour de la culture du libre et des communs.
- Qu’est-ce que l’association Faire École Ensemble ?
Une association collégiale qui a vu le jour au moment où il s’est agi d’assurer la continuité pédagogique. Elle vise à faciliter le soutien citoyen à la communauté éducative au sens large (enseignant·es, agents publics, parents, élèves, etc.), notamment en mobilisation et en mettant en relations des personnes et des réseaux qui n’ont pas l’occasion de travailler ensemble, par exemple des enseignants, des designers, des informaticiens, des architectes, des chercheurs, etc.
- Comment FÉE a fonctionné concrètement ?
À travers des discussions et retours d’expériences issus du terrain au moment de la mise en place de la continuité pédagogique, ont été identifiés plusieurs difficultés et problématiques. Des personnes, aux profils largement pluridisciplinaires, se sont organisés à travers une série d’actions pour y faire face (pour plus d’information, tout est documenté ici).
a. Lors du confinement, deux phénomènes concomitants
On le sait, une des problématiques de terrain qui a rapidement émergé a été de trouver des outils et des ressources numériques adaptées pour assurer la continuité pédagogique. Sur le terrain, on a pu constater deux phénomènes concomitants qui se sont développés dans l’urgence de la crise :
- Beaucoup de personnes (parents, professeurs, élèves) utilisaient des outils et des ressources numériques existantes comme si ils étaient des communs, c’est-à-dire qu’il y a eu de facto une pratique généralisée de remix et de réappropriation de contenus et de logiciels qui ne tenait pas vraiment compte des questions de propriétés ou de licences, et deuxièmement,
- Les outils proposés par les GAFAM ont été largement utilisés - on pense par exemple aux boucles Whatsapp, à la version Education de Google ou de Microsoft, des logiciels comme padlet ou comme Zoom.
- La puissance et la facilité d’accès à ces outils, combiné aux limites des solutions institutionnelles, a généré un recours massif à ces solutions commerciales.
-* Du fait de l’engagement de membres de FÉE dans des initiatives qui relèvent du libre et des communs, une dynamique a été initiée pour :
-** Alerter sur les risques d’une hégémonie des GAFAM en France, dans le secteur de l’éducation comme conséquence de la crise et comme cela a été fait, par volonté politique, dans des pays comme l’Italie et l’Irlande.
-** Mettre en lumière être des alternatives souveraines et souhaitables
Quelles sont-elles ces alternatives ? Et qu’entend-on par le terme “les communs” ?
b. Les communs
Quand on parle des communs, on parle de trois éléments :
- des ressources,
- une communauté qui les emploient
- les règles que cette communauté se donne pour gérer ces ressources
Pour être même plus précis, ce sont les phénomènes d’interaction entre ces trois éléments qui sont en fait désignés par le terme de communs.
- Prenons l’exemple de Wikipedia : il y a bien une ressource (c’est la base de connaissances), il y a une communauté (les auteurs et les éditeurs et les lecteurs de Wikipédia) et il y a un ensemble de régimes et de protocoles établis par la communauté pour l’édition et de la création de contenus. Le commun “Wikipedia” émerge donc à partir de ces trois éléments.
- Le logiciel libre : quand on parle du libre, on parle en fait d’une pratique des communs, qui vient du milieu de l’informatique. Des communautés de développeurs de logiciels se sont organisés pour mutualiser leurs travaux, les documenter afin que d’autres puissent utiliser, se réapproprier et augmenter ces logiciels selon certaines valeurs, qui sont garanties par les licences associées à ces outils : c’est la liberté d’utiliser, de copier, d’étudier et de modifier les logiciels.
Explicitons maintenant pourquoi ces valeurs nous paraissent pertinentes et même essentielles dans le contexte de l’éducation. Il s’agit de re-situer en quoi ces démarches sont souhaitables, en dehors du seul discours sur l’aspect moral, qui prévaut aujourd’hui quand on parle de libre.
2 - Faire (en) commun(s) dans l’éducation
Si on regarde comment se font les communs, comment ils s’élaborent et se pratiquent, on voit tout d’abord que cela repose sur des logiques de contribution et de partage. Les productions qui sont créées, sont une concrétisation de ce travail collectif : elles le donnent à voir et permettent à chacun d’en bénéficier, qu’il s’agisse de connaissances rendues disponibles ou d’outils. Mais avant tout, le but recherché lorsqu’on “fait commun”, c’est l’émancipation de tou·tes et de chacun·e dans et par cette réalisation collective, et là, on retrouve une des missions chères à l’école.
Donc, pour approfondir, il nous semble important d’insister sur deux intérêts majeurs à faire commun dans l’éducation :
a. Souveraineté et sobriété numériques
Tout d’abord, cela permet à la communauté éducative d’avoir la maîtrise de ses outils, de ses ressources et de ses données, càd que les réalisations collectives qui sont élaborées, sont conçues et gérées par et pour la communauté éducative.
En cela les communs numériques constituent une alternative aux GAFAM : Pourquoi c’est important ?
Parce que ces grands groupes, au-delà du problème de monopole qu’ils constituent, qui n’est pas un petit problème en soi - ont surtout la maîtrise totale des données que nous générons par notre usage, ainsi qu’une totale liberté sur les modalités de monétisation et de partage de ces données - avec les impacts sociaux et politiques négatifs que l’on commence à bien identifier.
Les communs numériques représentent donc un levier pour recouvrer une part de souveraineté numérique, mais aussi pour mettre en place une gouvernance multilatérale de nos données, de leur hébergement et des outils qui permettent de les exploiter.
Il faut aussi préciser, et ce n’est pas négligeable quand on voit l’empreinte grandissante du numérique en termes écologique, qu’il est urgent de se préoccuper des questions de sobriété numérique et d’éco-conception, que ce soit par exemple en valorisant des hébergements plus locaux, en favorisant les installations d’instances distribuées, ou en encourageant des usages hybrides, entre en ligne et hors ligne, c’est à dire en prenant l’habitude de ne pas considérer le numérique comme illimité ou infini.
Tous ces aspects, sociaux, économiques, écologiques (au sens large) et politiques, sont interdépendants et sont bien au cœur des processus de conception numérique, dont il nous paraît important d’avoir la maîtrise.
b. Des opportunités pédagogiques
Mais aussi, et c’est peut-être moins souvent compris, participer à la culture du libre et des communs, qu’on parle de communs numériques ou non, présente de véritables opportunités en termes pédagogiques.
D’abord en termes d’apprentissage :
- En effet, prendre part à des processus de conception et de développement d’outils numériques ou créer des ressources pédagogiques permet de passer d’une posture d’utilisateur ou de consommateur à une posture de concepteur ou contributeur. Et c’est extrêmement formateur.
- On le sait : expliquer quelque chose à quelqu’un d’autre permet de se poser toute une série de questions d’ordre “méta” et ainsi d’apprendre plus en profondeur.
- Donc, se poser la question de ses outils permet d’une part, pour les élèves et les enseignants, le développement de compétences méta-cognitives. telles que la réflexivité, la planification, l’adaptation des rapports entre la fin et les moyens, la régulation, etc.
Mais développer des outils et ressources libres peut permettre aussi d’entamer une véritable transformation culturelle pour l’école :
- On parle beaucoup de devenir acteurs - que ce soit pour les enseignants ou les élèves. Ça relève d’ailleurs presque de l’injonction aujourd’hui. Mais qu’est-ce que ça recouvre concrètement ? Comment agir, vers quoi, pour quoi faire ?
- Développer une pratique des communs est justement une manière très concrète de devenir acteur, dans son travail, dans son apprentissage. En alimentant des projets collectifs qui émancipent (on l’a dit, en redevenant maître de ses outils et du lien entre fins et moyens) et en permettant de dépasser l’échelle de la classe ou de l’établissement, ce sont des pratiques qui motivent et mettent en lien, c’est-à-dire qu’elles ouvrent des dynamiques extrêmement fécondes pour l’école (et en plus à moindre frais par rapport à l’argent injecté aujourd’hui dans le développement de solutions propriétaires pas toujours satisfaisantes !).
Ces dynamiques sont aussi libératrices :
- Elles désinhibent et encouragent les expérimentations justement du fait de la dimension collective et la mise en partage des expériences de chacun·e. In fine elles permettent de prendre des risuqes, déplacer, et mettre en mouvement nos pratiques.
- Pour les élèves par exemple, c’est une vraie bascule : ils deviennent des contributeurs, des concepteurs (et ça peut aller jusqu’à la conception de séquences pédagogiques - on le verra dans quelques instants avec l’exemple de do•doc). Ils deviennent des créateurs de ressources “pour de vrai”, c’est à dire que ces contributions dépassent le cadre de l’école et profitent à la société toute entière. Le rôle des familles peut aussi être réinventé : elles peuvent accompagner la production de communs, participer à leur gestion et trouver ainsi d’autres rapports avec l’institution et avec le corps enseignant.
Pour conclure donc sur la question des opportunités, on voit que cela permet de décloisonner l’école et de mettre en lien les élèves et les enseignants et la communauté éducative au sens large avec d’autres acteurs de la société civile et encourager les collaborations avec des chercheurs, des concepteurs (développeurs, designers, makers, architectes ou autre), des associations, des institutions culturelles, etc… et de générer des communautés de pratiques.
Ces dynamiques, si on veut bien les encourager, pourraient faciliter une redéfinition collective du rôle de l’école, comme beaucoup l’appellent de leurs vœux depuis plusieurs années maintenant, c’est-à-dire de ne pas seulement parler d’apprentissages mais bien de communautés de pratiques à l’échelle de la société.
3 - Un exemple avec do•doc
Pour illustrer ce qui vient d’être dit et le rendre un peu concret, nous aimerions partager avec vous et à deux voix, l’expérience de la conception d’un outil libre : do•doc.
Pour le présenter rapidement, do•doc est un outil collaboratif qui sert à la documentation : il a été conçu pour enregistrer facilement des contenus multimédias, pour permettre l’organisation de ces contenus afin de les partager en les publiant.
Cet outil, pensé de manière modulaire pour s’adapter aux situations, a un pendant numérique : il y a un logiciel, disponible en ligne, qui s’installe sur un ordinateur et s’utilise en local avec plusieurs appareils qui peuvent s’y connecter, ou il s’installe sur des serveurs distants et s’utilise en ligne. Mais il a aussi un pendant physique, mobilier, car nous avons bien perçu l’intérêt de concevoir des espaces de travail, des stations, adaptées aux usages numériques.
a. Comment est né do•doc ? (Pauline)
Cette histoire nous semble importante à raconter pour bien comprendre la spécificité de cette démarche.
D’abord, le besoin d’un dispositif efficace de documentation a émergé à partir de notre pratique en tant qu’éducateurs - et le nous, ici, se réfère au collectif de design l’Atelier des chercheurs. En effet, nous avons initié des élèves de primaire au design dans le cadre d’ateliers périscolaires.
Et,parce que l’enseignement du design passe par de nombreuses itérations, qu’on a besoin de comprendre et de justifier les choix opérés sur un temps long, nous avons trouvé judicieux (parce que nous savions le faire) de mettre au point un petit outil de collecte de traces photographiques des activités des élèves. Et il était important pour nous d’autonomiser les élèves là-dessus, c’est-à-dire que ce soit eux qui soient aux manettes et qui produisent leur propre documentation.
Combinaison de design, recherche-action et pédagogie : le format de “résidence” dans des classes
Dans le milieu de l’éducation ce premier prototype a intéressé les personnes qui en ont eu connaissance et il nous a paru essentiel de poursuivre le développement de manière située et d’y associer une dimension de recherche.
Nous ne nous sommes donc pas fait incubé et nous n’avons pas lancé une start-up edtech. Notre démarche a été de “faire communs” avec la communauté éducative, de manière à la fois à aboutir à la production d’un outil efficace et pertinent, mais également et surtout, de fédérer une communauté et de générer des connaissances qui la nourrissent, de manière rigoureuse. Pour le dire autrement, les profs ne sont pas devenus nos clients, et l’école un marché potentiel. Il s’est alors agi de mettre en place des cadres de réciprocité vers un objectif commun sur la base de préoccupations communes.
Une première recherche-action longitudinale dans une classe de CP, a permis de concevoir les principes de do•doc en y associant les élèves (je documente ça en détail dans ma thèse). Un des effets extrêmement riche de ce processus de conception collective a été l’élaboration progressive de nouvelles activités, dans lesquelles les élèves étaient force de proposition : ce sont eux qui suggéraient des manières de faire, des objets de travail, qui produisaient des tutoriels et des ressources qu’ils partageaient au sein de leur établissement. Ils en étaient d’ailleurs très fiers. Ça a complètement changé la dynamique et la micro-culture de la classe et a entamé localement la production de communs.
Ça a été une expérience transformatrice pour tout le monde, du directeur de l’établissement aux élèves, et pour nous designers en premier lieu.
Par résidence de recherche action, ici, on entend le fait de partager le quotidien d’un collectif (une classe ou autre) et de prendre part aux activités de ce collectif. Vivre un petit moment avec eux, afin d’une part de se connaître et d’instaurer un climat de confiance et des relations sincères et durables (il ne s’agit pas de mener une étude et de s’en aller) et de réellement vivre les enjeux et les problématiques qui se posent au quotidien dans ces situations et pour ces personnes.
Ces “résidences” de recherche action répétées nous ont amenées à itérer sur l’outil do•doc et à produire des “versions”, documentées et partagées.
On est à l’opposé d’une logique solutionniste et d’une recherche d’universalité - on sait à quel point les solutions universelles bien souvent ne conviennent finalement à personne. Au contraire, on adapte de manière située, à partir d’une base commune. Cette base est nourrie par une communauté, qui aujourd’hui existe autour de cet outil.
c. L’expérience d’une résidence au collège à Louise Michel (Christophe)
Je vais illustrer le côté enseignant. Tout d’abord, en découvrant do•doc, j’ai trouvé le logiciel extrêmement convaincant. Mais, ce qui était très stimulant, c’était de pouvoir se projeter dans le fait de le modifier et de l’adapter à mes situations pédagogiques.
Que créent la rencontre et les interactions entre enseignants, élèves et designers ?
C’est une relation qui s’établit à partir de ce qui existe déjà. Les professeurs et les designers réfléchissent ensemble à partir d’un besoin d’amélioration de nos pratiques, qu’elles soient numériques ou non d’ailleurs. Ça amène les professeurs, en collectif au sein de l’établissement, à se mettre dans une posture d’ingénieur-pédagogues, et de réfléchir avec des gens extérieurs au monde de l’éducation, qui amènent d’autres compétences, à trouver des réponses à nos problématiques situées et à documenter rigoureusement nos tentatives à des fins de partage.
Par exemple, aujourd’hui on adapte des kits pour des stations de stop-motion pour produire des petits films, kit qui devra aussi s’adapter et devenir portables pour documenter des sorties scolaires.
Et parce qu’il y a la dimension de communs et de libre, c’est participer à l’améliorer du logiciel dans l’idée de bien commun. C’est-à-dire que les fonctionnalités et astuces développées dans nos classes vont circuler et être réutilisées par d’autres. Mais surtout ce travail réalisé ensemble nous fait appartenir à une communauté qui grandit (on discute sur un forum ou via github) et qui regroupe des personnes de l’éducation mais pas que : on y trouve des personnes avec des profils vraiment variés qui ont aussi des problématiques liées à la documentation. On partage nos activités et cela permet de co-construire de nouvelles pratiques pédagogiques, rencontrer des gens et générer de nouvelles collaborations.
Je prends un exemple, une problématique que nous avons identifié dans mon collège a fait écho chez des makers au Bénin, et nous a amené à co-développé une fonctionnalité aujourd’hui disponible dans do•doc (en l’occurence il s’agit de pouvoir générer des documents modèles que les élèves peuvent ensuite remplir, en utilisant différents médias - photos, vidéos ou autre, et ouvrir ainsi à d’autres formes d’écritures).
Côté logistique et administratif, j’ai cherché pendant pas mal de temps à faire venir l’Atelier des chercheurs et à mettre en œuvre ce cadre de contribution. Comme vous pouvez l’imaginez et le vivre vous-mêmes certainement, ça a été un casse-tête car il y a très peu de marge de manœuvre et pas de ligne budgétaire pour s’engager dans ce type de collaboration.
Le modèle aujourd’hui nécessite une réflexion profonde pour adapter les cadres juridiques et financiers pour accompagner ce type de développement.
4 - Les propositions des EGN du libre et des communs
Et c’est justement ce à quoi nous avons réfléchi pendant les Etats Généraux du Numérique du libre et des Communs Pédagogiques, qui est un évènement contributif, là encore collégial, documenté avec des ressources disponibles sous licence ouverte. La première journée de rencontres a eu lieu le 3 novembre : plusieurs acteurs de l’éducation, de l’éducation populaire, du numérique et des tiers-lieux en intérêt pour le libre et les communs se sont rencontrés pour discuter et alimenter avec des propositions concrètes les questions de ressources et d’outils numériques pour l’éducation - que nous en sommes venus à nommer “communs pédagogiques”.
Parmi les propositions fortes quui ont été collectés pour encourager le développement de ces communs pédagogiques, voici 3 actions que le Ministère de l’Education Nationale pourrait participer à mettre en place :
1 - Reconnaitre la contribution des enseignants aux communs, qu’ils s’agissent de ressources ou de logiciels libres.
Nous avons identifié un nombre non négligeable de professeurs contributeurs (développeurs ou ingénieurs pédagogiques), qui pour l’instant ne bénéficient d’aucun soutien ni reconnaissance pour leur contribution, bien souvent fait en plus de leur temps de travail ou dans un cadre juridique flou.
De plus, des formations seraient utiles à mettre en place pour encourager d’autres à participer et à comprendre les mécanismes de contribution à des communs pédagogiques et ainsi vivre des dynamiques collectives enrichissantes.
Cette proposition a été débattue pendant les EGN du libre et des communs et quelques idées nous semblent intéressantes à vous soumettre :
- Par exemple, imaginer une cellule dédiée au libre et aux communs pour identifier, décharger et accompagner les profs qui créent spontanément des outils et ressources pédagogiques libres.
- Accompagner les différents opérateurs publics, producteurs de ressources que sont par exemple le CNED et France Télévision (via Lumni) qui ne sont pas sensibilisés à la question des ressources libres et des communs numériques.
2 - Participer à la création d’une fabrique des communs pédagogiques
Il s’agit de créer un dispositif d’action publique (un cadre, des règles) qui met effectivement en coopération des acteurs publics (écoles, académies, collectivités) et des communautés contributives (enseignants, médiateurs numériques, développeurs, designers, architectes, chercheurs, parents, et d’autre), sur des problématiques d’intérêt général dans le champ de l’éducation. Elle permettrait, entre autres, l’émergence et la préservation de communs numériques.
Par cela, il s’agit de rendre possible et d’encourager les pratiques des communs pédagogiques à travers un dispositif d’action publique qui permet plus de porosité entre les acteurs.
Elle poser la question de l’école comme participante à l’élaboration de nouveaux modèles de contributions et de productions citoyennes - de connaissances, d’outils ou autre - et par là, à redéfinir son rôle et son impact dans la société.
3 - Pérenniser et ouvrir apps. edu
L’annonce du déploiement officiel d’apps.education est un signal positif. Néanmoins, il serait intéressant d’aller plus loin, en faisant d’apps. edu un commun numérique :
- accessibles aux membres de la communauté éducatives (parents, enseignants, associations, etc.) afin de s’organiser localement et collectivement. Ce qui serait très utile par exemple dans le cadre des Cités Educatives
5 - Conclusion
L’usage des logiciels libres et l’accès aux communs sont gratuits mais leur production, leur qualité, leur accessibilité et leur pérennisation ont un coût : la contribution.
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