Innovation Pédagogique et transition
Institut Mines-Telecom

Une initiative de l'Institut Mines-Télécom avec un réseau de partenaires

Pour un enseignement supérieur à la hauteur des enjeux climatiques

Une contribution à la Convention Citoyenne pour le Climat déposée par un groupe d’acteurs : le REFEDD, CliMates, Together for Earth, le Collectif pour un réveil écologique, Low Carbon France, la FAGE, le Forum Français de la Jeunesse et les Jeunes Ambassadeurs pour le climat pour un enseignement supérieur à la hauteur des enjeux climatiques. En voici quelques extraits.

"Organisations représentant la jeunesse et le monde étudiant, nous sommes nombreuses à travailler depuis des années pour une meilleure intégration des enjeux climatiques, environnementaux et sociaux dans l’enseignement supérieur. Aujourd’hui, nous contribuons ensemble pour porter d’une seule et même voix plusieurs propositions pour une véritable éducation sur ces questions."

Un article repris de la contribution en ligne

L’enjeu est grand : la transition écologique ne peut se faire que si l’ensemble de la population a conscience de ce que représente aujourd’hui la crise climatique et intègre ces enjeux dans sa vie active. Il faut dès lors s’assurer que tous les étudiants aient de solides connaissances ainsi qu’une compréhension du rôle de leur futur métier dans la transition. Par ailleurs, tous les établissements d’enseignement supérieur doivent aussi avoir un rôle exemplaire vis-à-vis de leurs étudiants en enclenchant eux-mêmes cette transition écologique dans leurs campus.

Or, force est de constater qu’aujourd’hui très peu d’établissements sont à la hauteur. Seulement 11% des formations dispensent des cours sur le réchauffement climatique et la transition énergétique (The Shift Project, 2018). En tant qu’étudiants, jeunes diplômés, nous faisons l’expérience directe de cette lacune dans notre enseignement, alors que la population doit être formée et sensibilisée pour comprendre et accepter la mise en oeuvre de politiques climatiques ambitieuses.

La question de l’intégration des enjeux climatiques, environnementaux et de
biodiversité dans les formations de l’enseignement supérieur fait par ailleurs beaucoup parler d’elle depuis quelques mois. En effet, les députés Delphine Batho, Matthieu Orphelin et Cédric Villani ont déposé une proposition de loi sur le sujet.

Cette proposition de loi permettrait de répondre à plusieurs des propositions citées précédemment. Elle n’est à ce jour qu’au stade de révision, en vue de la rédaction d’une version définitive. Par ailleurs, nous ne savons toujours pas qui pourra inscrire cette proposition de loi à l’ordre du jour du Parlement. Nous incitons la Convention Citoyenne pour le Climat à soutenir cette proposition de loi et à demander à ce que le Gouvernement la mette à l’ordre du jour parlementaire et la fasse appliquer dans les prochains mois.

photo reprise de la contribution


Nos 6 propositions

Mettre en place un socle commun de connaissances précises et critiques des enjeux climatiques et environnementaux

Ce socle, fondé sur les faits scientifiques, donnerait à tous et à toutes les clefs de compréhension nécessaires pour une transition écologique et doit être étendu à l’ensemble des formations, pour généraliser à tous les citoyens une base de connaissances solide. Cet enseignement ne doit pas se faire en silo. Il est au contraire essentiel d’aborder ces enjeux dans leur ensemble : enseigner non seulement la question climatique, mais aussi les enjeux de biodiversité, de ressources et d’inégalités, dans une approche systémique et mobilisant non seulement les sciences dites “dures” mais également les sciences humaines et sociales.

La proposition de loi sur l’intégration des enjeux climatiques et environnementaux dans l’enseignement supérieur déposée par les députés Delphine Batho, Matthieu Orphelin et Cédric Villani a cette ambition. Elle constitue un socle solide permettant d’atteindre cet objectif et peut constituer une base de travail.

Un autre levier sur lequel s’appuyer est celui des fiches inscrites au Répertoire National des Certifications Professionnelles (RNCP). Les diplômes nationaux de l’enseignement supérieur en ont tous une, et elles détaillent les compétences devant être développées par la formation en question. En agissant directement sur les compétences que les formations doivent faire développer à leurs étudiants, nous pourrons intégrer rapidement et de manière automatique les enjeux climatiques et environnementaux dans l’enseignement supérieur. De plus, l’intérêt de passer par ces fiches RNCP est de préparer les étudiants à prendre en compte ces enjeux dans leur activité professionnelle afin d’avoir un pouvoir de transformation concret.

Nous soulignons également l’importance d’élargir cette proposition au delà de l’enseignement supérieur, et de s’assurer qu’un même socle commun soit dispensé à tous les niveaux de l’éducation des citoyens, du primaire jusqu’au secondaire, afin que les futurs étudiants aient déjà acquis certaines connaissances en entrant dans le supérieur.

2. Généraliser, en plus du socle commun, un enseignement de ces enjeux adapté à chaque cursus, notamment dans l’enseignement supérieur

La mise en place d’un socle commun de connaissances nous semble être une condition nécessaire mais pas suffisante. Afin que l’intégration des enjeux climatiques et environnementaux dans les enseignements ait un réel impact dans la société, il faut les adapter à chaque cursus. C’est l’une des propositions amenées par la proposition de loi de Mme Batho et MM. Villani et Orphelin (cf. résumé de la contribution), et la Convention citoyenne a son rôle à jouer dans la définition de ce qui devrait être inclus dans chaque cursus.

À titre d’exemple, nous pouvons nous inspirer des propositions publiées par :

  • Le collectif étudiant Pour Un Réveil Écologique sur leur plateforme participative (elles concernent principalement les études en science de gestion et en ingénierie) ;
  • La Fédération Nationale des Associations Représentatives des Etudiants en
    Sciences Sociales (ARES) dans leur Livre Vert ;
  • De ce qui est fait dans les cursus de géographie depuis la loi Grenelle 1 (article 55).

3. Garantir l’importance et la qualité donnée aux formations sur ces enjeux

Le niveau d’investissement en cours est influencé par la place des enseignements dans les maquettes pédagogiques. Le volume horaire, la qualité des intervenants, l’exigence de l’évaluation, ou encore le nombre de crédits ECTS octroyés sont autant de vecteurs à mobiliser pour garantir le caractère central de ces formations.

Nous proposons donc d’offrir une place aux enjeux climatiques dans les référentiels d’évaluation des formations du Haut Conseil à l’évaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur (Hcéres) et de la Commission des Titres de l’Ingénieur (CTI) ainsi que dans les référentiels d’évaluation des formations par les étudiants.

Ces référentiels devraient porter sur plusieurs points : ceux mentionnés plus haut, mais aussi la définition de compétences disciplinaires précises sur les enjeux climatiques. Ainsi, les universités et écoles auraient l’obligation de s’auto-évaluer sur ces sujets et de mettre en oeuvre une politique de formation à même d’y répondre.

4. Exiger un plan massif de formation continue rendant obligatoire la formation aux enjeux climatiques et environnementaux

Ce plan massif devrait concerner aussi bien les dirigeants, cadres et salariés du privé que les fonctionnaires, notamment les membres de la haute fonction publique. Ces formations devront inclure à la fois le socle commun défini en point 1 et des solutions de transformation des activités et des pratiques adaptées à chaque secteur.

Les services des ressources humaines des entreprises et des institutions publiques devront être en mesure de proposer des formations adaptées et en cohérence avec le secteur d’activité de la structure. Pour cela, nous proposons de :

  • Inciter à utiliser le Compte personnel de formation, compte qui permet aux salariés de se former tout au long de leur vie professionnelle quelle que soit leur situation ou leur contrat de travail, pour les formations dédiées à ces enjeux.
  • Rendre ces formations obligatoires dans toutes les entreprises et dans la fonction publique, au même titre que les formations relatives à la sécurité par exemple.

5. Rendre obligatoire l’application du Plan Vert pour les établissements d’enseignement supérieur d’ici 2022

L’article 55 de la Loi Grenelle I du 3 août 2009 impose à tous les établissements d’enseignement supérieur d’élaborer un « Plan vert » pour leur campus.

 1 Stratégie et gouvernance : formalisation d’une politique de Développement Durable & Responsabilité Sociétale (DD&RS) dans toutes les activités de l’établissement, notamment au travers de l’élaboration d’une stratégie et d’un plan d’action, l’intégration la démarche dans l’ensemble des services et directions de l’établissement et de ses activités, et l’affectation des moyens nécessaires à la conduite de cette démarche.

 2 Enseignement et formation  : intégration de ces enjeux dans les programmes et enseignements et formation des personnels des établissements (enseignants, chercheurs, administratifs).

 3 Recherche  : promotion de la recherche interdisciplinaire, afin qu’elle soit aussi au service des programmes de formations initiales et continues.

Ce Plan Vert est une stratégie détaillée d’intégration des enjeux environnementaux et sociaux dans l’intégralité des activités des établissements supérieurs, selon cinq grands axes :

 4. Gestion environnementale : développement d’une politique de diminution des émissions de gaz à effet de serre et d’utilisation durable et de réduction de la consommation des ressources au sein de l’établissement, notamment au travers de plusieurs leviers : rénovation du bâti, bilan carbone, gestion des déplacements salariés et étudiants, politique d’achats responsables, réduction des déchets, politique favorable à la biodiversité sur les campus etc.

 5. Politique sociale et ancrage territorial : développement d’une politique de parité et de diversité au sein des personnels, d’une politique relative à la qualité de vie dans l’établissement pour les personnels et les étudiants, et d’une politique d’égalité des chances pour les étudiants.

Un référentiel Plan Vert a été élaboré pour détailler son contenu et accompagner les établissements dans leur démarche.

Ce Plan Vert permettrait ainsi de mettre les établissements sur la voie de l’exemplarité en établissant une stratégie de transition écologique qui touche non seulement les formations et la recherche, mais les incite aussi à proposer un cadre de vie exemplaire sur leur campus, tout cela dans un esprit de justice sociale et d’équité pour tous les étudiants et les personnels.

Bien que cette disposition législative existe depuis dix ans déjà, très peu d’établissements ont respecté l’obligation d’élaboration de leur Plan Vert, encore moins l’ont réellement mis en place.

A titre d’exemple, un label DD&RS avait été créé pour récompenser les établissements qui entrent véritablement dans cette démarche, et à ce jour seulement 25 d’entre eux sur plus de 3 700 l’ont obtenu.

Rendre obligatoire, non seulement l’élaboration mais aussi la mise en oeuvre de ce Plan Vert par tous les établissements permettrait d’assurer qu’une véritable transition est enclenchée dans le monde de l’enseignement supérieur, et qu’ainsi ces établissements puissent jouer un rôle exemplaire auprès de leurs étudiant.e.s, ,actuels et futurs acteurs de la société. En effet, les étudiants ne peuvent intégrer dans leur vie et leur formation ces enjeux si la réalité des pratiques de leur établissement est en inadéquation avec les formations dispensées.

La vie sur les campus doit être une expérience pour apprendre à devenir un acteur de la transition écologique.

6. Rendre les partenariats des établissements compatibles avec la transition écologique

L’accès à des débouchés professionnels en lien avec les enjeux environnementaux et climatiques, prenant en compte le développement de valeurs compatibles avec la transition écologique, est une revendication de plus en plus forte des étudiants. En témoignent les 30 000 signatures d’étudiants du Manifeste pour un réveil écologique revendiquant l’accès à un emploi compatible avec leurs valeurs écologiques.

Or, cette transition est impossible si les partenariats des établissements ne promeuvent pas des entreprises compatibles avec la transition écologique. Nous demandons donc qu’un moratoire sur les politiques partenariales des établissements d’enseignement supérieur soit mis en place. Son objectif sera de lister les partenaires actuels des établissements et de définir les moyens leur permettant de nouer des partenariats responsables alignés avec la stratégienationale bas-carbone. Ce travail devra être placé sous le contrôle d’un organisme indépendant et transparent ou bien ajouté aux référentiels Hcéres et CTI afin d’être évalué par ses auditeurs.

Une contribution portée par une coalition d’organisations de jeunes :

Licence : CC by-sa

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