Innovation Pédagogique et transition
Institut Mines-Telecom

Une initiative de l'Institut Mines-Télécom avec un réseau de partenaires

Le colloque Éducation 4.1 ! par Distances et Médiations des Savoirs

Un article repris de http://journals.openedition.org/dms/3473

Un article de Monique Grandbastien, Pierre Mœglin et Daniel Peraya repris de la revue Distances et Médiations des Savoirs, une publication sous licence CC by sa

Pour notre revue, l’année 2019 a commencé par un événement marquant : le colloque international Éducation 4.1 ! tenu à Poitiers les 17 et 18 janvier, organisé conjointement par l’EIFAD (École d’Ingénierie de la Formation à Distance du CNED) et la revue DMS. Les colloques ont régulièrement nourri et complété les contenus de D&S, puis DMS. En effet, comme Martine Vidal nous le rappelait l’an passé (Vidal, 2018) dans l’historique qu’elle brossait de la revue, « nous avons toujours envisagé D&S comme un carrefour, du fait d’une part de son domaine, lui-même croisement de plusieurs disciplines, et d’autre part de la nature de l’enseignement à distance, aux multiples chemins ». Plusieurs colloques ont ainsi été co-organisés avec le CNED afin que chercheurs, praticiens et lecteurs français et internationaux puissent échanger et discuter, le comité éditorial de D&S étant largement impliqué en tant que comité scientifique des colloques. Il y eut ainsi des rencontres au CNED, et plus précisément à l’EIFAD en 2004, 2009 et 2012.

Dix ans après la tenue du symposium international de 2009, il s’agissait notamment d’identifier les enjeux des mutations importantes et diversifiées qui affectent les manières d’enseigner, d’apprendre et d’organiser l’éducation en général et la formation à distance en particulier, entre autres, du fait de la numérisation, de la dématérialisation et de la « plateformisation » des modes de fonctionnement en éducation et en formation.

L’ambition de ce colloque était d’examiner ce qui se cache derrière les discours enchantés et eschatologiques, les illusions qu’ils véhiculent, mais aussi ce qui est appelé à rester des innovations ou des évolutions incessantes d’ordres très différents, technologiques, pédagogiques et organisationnels, qui marquent d’ores et déjà les réalités profondes de la formation à distance. L’approche retenue, en lien avec les perspectives de DMS, favorisait l’ouverture, à la fois pluri et interdisciplinaire, avec notamment pour thématiques :

 les usages et les pratiques ;

 les modalités et les stratégies ;

 les politiques et les enjeux.

Les travaux présentés sont déjà accessibles de façon pérenne sous la forme de pré-actes sur le site du colloque [1], ils peuvent être consultés par auteur et par session à partir de ce site. Parmi ces contributions, celles rentrant dans le périmètre de la revue, enrichies par les discussions menées lors de leur présentation à Poitiers et retravaillées en fonction des exigences d’une publication scientifique viendront nourrir la réflexion de nos lecteurs au cours des trimestres à venir, soit dans les numéros thématiques déjà programmés, soit le plus souvent dans les numéros varia.

Du colloque à DMS

Le présent numéro fait naturellement écho aux thématiques débattues lors du colloque. Par exemple, parmi les approches à développer ultérieurement, Pascal Marquet suggérait aux chercheurs d’analyser d’autres résultats que ceux observés chez leurs propres étudiants. Le texte de J.-S. Vayre et N. Lenoir s’inscrit dans cette perspective. Ils ont en effet étudié la question de la démocratisation des savoirs dans les MOOCs à partir d’une enquête sur l’usage du MOOC « Manage your prices » offert sur la plate-forme britannique FutureLearn.

Les MOOCs constituent aussi un objet d’étude pour R. Chaker qui aborde la question du rôle des représentations graphiques et textuelles des informations et des connaissances dans le processus de leur compréhension et de leur mémorisation. Il analyse un corpus de représentations graphiques issues de 50 Moocs et en propose une classification d’un double point de vue, celui des sciences de l’éducation et celui de la sémiotique. La question du double statut, sémiotique et pédagogique, des représentations graphiques ne nous est pas inconnue. Elle apparaît avec le développement des sciences de l’information et de la communication et plus particulièrement de la sémiologie dès les années 60. A cette époque effet, les « auxiliaires audiovisuels », longtemps considérés comme des objets techniques, des outils ou comme de simples tuyaux de transmission des connaissances acquièrent un statut propre en tant que langage particulier. Dans la constitution du domaine, c’est donc une étape clé de son évolution (Peraya, 2010). Comme souvent, ce courant de recherche a connu des phases d’intérêt et de désintérêt. Aujourd’hui, le succès des MOOCs a contribué à remettre à l’avant-plan celle de vidéos des MOOCs, thématique à laquelle a été consacrée la rubrique « Débat-discussion » en 2017 (numéros 17 à 20). Il s’agit là d’exemples significatifs du caractère pluridisciplinaire de la communauté des chercheurs et praticiens autour de la formation à distance.

Le lecteur retrouvera cette approche interdisciplinaire ainsi que ces regards croisés dans la thésographie que propose C. Peltier ; elle rassemble des thèses en sciences de l’éducation, en psychologie, en sciences cognitives et informatique, en sciences de l’information et de la communication, en sciences du langage et en sociologie. Enfin parmi les thèmes émergents, celui des données recueillies au cours des interactions entre les apprenants et les artefacts numériques est omniprésent. Il est discuté dans DMS dès ce numéro puisque c’est le choix de D. Peraya pour la rubrique Débats Discussions de cette année.

De plus, ce premier numéro est un « Varia », c’est à dire qu’il n’est pas dédié à un thème particulier. Dans des éditoriaux récents (ceux des numéros 21 et 24), nous avions évoqué le statut particulier des numéros « Varia » et le fil rouge qui relie les différents articles aux thématiques phares de DMS. Ce numéro ne fait pas exception. Parmi les innovations que connaissent les formations à distance ces dernières années, les MOOCs ont déjà fait l’objet de plusieurs articles et discussions. Ces investigations se poursuivent dans ce numéro avec les deux articles que nous venons de mentionner. Mais avec une synthèse de travaux sur l’encadrement à distance dans l’enseignement supérieur que nous propose B. Pudelko, le fil remonte bien avant, aux origines de la revue D&S qui a publié deux articles sur le tutorat dès son premier numéro (Denis, 2003), (Hauew, 2003) et de nombreux autres ensuite. La question des tuteurs fait également l’objet d’un chapitre du livre intitulé « Formation à distance en Enseignement Supérieur », édité par F. Lafleur et G. Samson aux Presses Universitaires du Québec, dont C. Peltier nous fait une intéressante recension.

Les textes en quelques mots

Dans leur article intitulé « Vers la fin des inégalités en formation » J-S. Vayre et N. Lenoir abordent sur un cas précis la question de la démocratisation des savoirs par les MOOCs. Cet accès aux savoirs pour tous, jeunes ou plus âgés, quels que soient leurs parcours, leur localisation, le moment où ils peuvent se former, etc. est en effet l’un des bénéfices souvent avancés pour le développement de MOOCs, mais certains chercheurs mettent en garde devant un enthousiasme trop naïf. Les auteurs ont donc étudié les données sociodémographiques de plusieurs sessions du MOOC « Manage your prices » offert sur la plateforme britannique FutureLearn. Les nombreux facteurs qu’ils prennent en compte rappellent la complexité des formations en ligne tout au long de la vie, même si les résultats de cette étude restent descriptifs et exploratoires et gagneraient, comme le soulignent les auteurs, à être complétés par des études plus qualitatives.

Les concepteurs de ressources pour la formation en ligne connaissent l’importance de choisir les représentations de connaissances pertinentes pour accompagner la compréhension des concepts présentés. La taxonomie des schémas proposée par R. Chaker à partir de la psychologie de l’éducation et de la sémiotique sera donc très utile pour la formation de tous les concepteurs de cours en ligne. Elle a été élaborée à partir d’une analyse systématique des schémas utilisés dans 50 MOOCs. L’auteur invite à compléter ce travail par une étude qui analyserait les effets des schémas pédagogiques sur l’engagement, voire le succès des apprenants.

Des ressources plus adaptées aux apprenants ne feront pas disparaître le besoin d’accompagnement humain dans la formation à distance, à différents niveaux et sous différentes formes. B. Pudelko utilise pour cet accompagnement au sens large le terme « encadrement à distance » et propose une synthèse de travaux parus entre 1974 et 2016 à propos de l’enseignement supérieur, aussi bien dans des publications anglophones que francophones. Il s’agit d’un vaste projet dont le présent article ne décrit que la première partie et qui devrait intéresser à la fois les chercheurs et les décideurs. Aux chercheurs qui ont à prendre connaissance des nombreux articles parus sur le sujet, il apporte en particulier des clarifications sur les nombreux termes employés (support, tutorat, etc.) et sur les fonctions qui leur correspondent. Les décideurs apprécieront qu’un accent particulier soit mis dans l’analyse des expériences répertoriées sur le contexte organisationnel et institutionnel.
L’invitation au débat

Comme nous l’indiquions précédemment, D. Peraya vous invite cette année à débattre autour de ce qu’il est convenu d’appeler les Learning Analytics dans la littérature internationale et que l’on peut traduire par l’analytique des apprentissages instrumentés. Il s’agit du gisement de données issues des interactions entre élèves et machines, ou, dit autrement des traces laissées par ces apprenants utilisateurs des dispositifs de traçage embarqués dans les plateformes de formation. Le sujet est vaste, cette invitation au débat apporte un panorama de l’existant et invite à en explorer les apports, les limites, les enjeux et les visions d’avenir. Cette introduction propose une bibliographie déjà riche qu’il n’est certainement pas nécessaire d’étudier en totalité pour aborder le sujet. En effet les Learning Analytics sont multiformes : des points de vues variés seront donc nécessaires pour enrichir le débat.

En écho à l’étude de B. Pudelko, C. Peltier nous fait découvrir l’ouvrage Formation à distance en enseignement supérieur (154 pages), dirigé par F. Lafleur et G. Samson et paru aux PUQ en 2017. Il s’agit aussi de fournir un cadre de réflexion propre à la prise de décision à tous ceux qui s’engagent dans des offres de formation à distance pour l’enseignement supérieur, dans l’évaluation de ces formations ou dans l’accompagnement de formateurs.

Enfin, comme dans chaque premier numéro d’une année, nous proposons une rubrique thésographie qui présente des thèses francophones soutenues durant l’année précédente, dont les problématiques rencontrent notre champ. Nous aimerions recevoir de la part des doctorants ou de membres de jurys de thèses des propositions tout au long de l’année. En l’absence de telles propositions, C. Peltier a fait une sélection particulièrement intéressante par son volume (35 thèses), par la diversité des sujets abordés, mais surtout par les points de vue variés et les approches disciplinaires différentes selon lesquels ces sujets sont abordés.

Bibliographie

Des DOI (Digital Object Identifier) sont automatiquement ajoutés aux références par Bilbo, l’outil d’annotation bibliographique d’OpenEdition.
Les utilisateurs des institutions abonnées à l’un des programmes freemium d’OpenEdition peuvent télécharger les références bibliographiques pour lesquelles Bilbo a trouvé un DOI.

Denis, B. (2003). Quels rôles et quelle formation pour les tuteurs intervenant dans des dispositifs de formation à distance ? Distances et savoirs, 1, 19-46. Récupéré de https://ds.revuesonline.com/article.jsp ?articleId =932

Haeuw, F. (2003). Vers un redéploiement des compétences des formateurs, dans les dispositifs de formation ouverts et à distance, Distances et savoirs, 1, 47-59. Récupéré de https://ds.revuesonline.com/article.jsp ?articleId =933
DOI : 10.3166/ds.1.47-59

Peraya. D. (2010). Médias et technologies dans l’apprentissage : apports et conflits. Dans B. Charlier et F. Henri. Apprendre avec les technologies (p. 23-34). Paris : Presses universitaires de France.

Vidal, M. (2018). Une page d’histoire, Distances et médiations des savoirs, D&S avant DMS, Distances et médiations des savoirs, 21. Récupéré de https://journals.openedition.org/dms/2147

Référence électronique

Monique Grandbastien, Pierre Mœglin et Daniel Peraya, « Éditorial », Distances et médiations des savoirs [En ligne], 25 | 2019, mis en ligne le 24 mars 2019, consulté le 28 mars 2019. URL : http://journals.openedition.org/dms/3473

Licence : CC by-sa

Notes

[1Pré-actes du colloque Education 4.1 ! 17 – 18 janvier 2019, Poitiers, https://education4-1.sciencesconf.org/data/pages/20190112_Education4_1_Preactes.pdf

Répondre à cet article

Qui êtes-vous ?
[Se connecter]
Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Suivre les commentaires : RSS 2.0 | Atom