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Interviews croisés autour des MOOC

7 juin 2015 par Miss MOOC MOOC 426 visites 0 commentaire

Un article repris de https://missmoocparis.wordpress.com...

Quand Mister MOOC Francophone rencontre Miss MOOC

MOOCFLes MOOC, (Massive Open Online Course) ces cours en ligne interactifs apparus de façon visible en France à partir de 2014 agrège tout un écosystème d’acteurs. Dans cette phase innovante, un esprit de collaboration, de co-construction important anime cette communauté de professionnels, de passionnés, qui croisent leurs retours d’expériences, échangent leur point de vue…
C’est dans ce contexte que Vincent Datin (Fondateur du site MOOC francophone) et Jocelyne Turpin (votre dévouée Miss Mooc)  ;-) décident de partager ce qu’ils observent des MOOC, des usagers, des entreprises…via un interview croisé.
Nous voici donc partis pour deux interviews en un…

Racontes-nous Vincent, qui est l’auteur du site MOOC Francophone ?

168e3daAvant tout, je suis un « grand consommateur » de MOOC. Depuis octobre 2012, date de mon 1er MOOC, je les utilise pour construire des compétences transversales à mon domaine d’activité, et également pour favoriser une réflexion plus profonde, acquérir une vision globale d’un monde toujours plus complexe. Je suis donc en permanence à l’affût de nouveaux cours en ligne pour développer un parcours d’apprentissage cohérent. Le site MOOC Francophone est d’ailleurs le fruit de cette veille que je partage maintenant avec 65 000 visiteurs chaque mois.

Ma véritable activité est toutefois la création de site web et l’animation de communautés virtuelles.

Et toi Jocelyne ? Que viens-tu chercher dans les MOOC ? Un lien entre les connaissances acquises dans le cadre de MOOC et les compétences nécessaires à ton activité professionnelle ?

0d8493bMon entrée dans les MOOC en 2013 répond à 3 choses : la recherche de solutions à des problématiques de formation que je côtoyais en entreprise, des pistes d’amélioration d’animation de communautés professionnelles, et (à titre personnel) un besoin d’expérimentation des innovations pédagogiques …

Et cela m’a convaincue… J’en ai expérimenté de nombreux, j’ai réalisé des ingénieries de MOOC, des vidéos, implémenté des plateformes… et j’ai eu envie de partager cela via un blog miss-mooc.paris.

 Ton site reçoit 65 000 visiteurs/mois, tu as interviewé de nombreux « faiseurs de MOOC », quel regard portes-tu sur l’écosystème des MOOC et son développement depuis 3 ans ?

168e3daUn regard bienveillant avant tout. Les MOOC sont encore jeunes et je les regarde grandir avec plaisir… On ne parle plus d’eux comme une révolution ce qui est une bonne chose ! On a vu dans un premier temps un certain nombre de MOOC lancés à titre expérimental sans adéquation avec les besoins des apprenants. Réalisés en moyenne avec une centaine d’heures de travail, ces premiers MOOC de mauvaise qualité ont fait beaucoup de mal à l’écosystème.

Aujourd’hui, la conception d’un MOOC n’est plus portée par quelques personnes motivées, elle est devenue collaborative. Des concepteurs d’horizons divers s’associent pour des productions de qualité, certains apprenants participent également à la construction… Le meilleur est certainement à venir.

J’observe également avec intérêt l’arrivée de nouvelles plateformes européennes qui développent des MOOC multi-langues. Même si la technologie manque encore un peu de maturité, j’aime bien cette possibilité de pouvoir suivre un MOOC à la fois en anglais, en français, en espagnol et dans bien d’autres langues encore… Des forums multi-culturels vont enfin voir le jour !

Que penses-tu de l’offre MOOC en général ? Est-elle suffisamment diversifiée ? Quelles sont les thématiques que tu aimerais voir plus présentes ?

0d8493bL’offre se multiplie et comme tu le fais remarquer, je crois que nous n’en sommes qu’au début… cela continue à croître.
Nous devons cependant garder à l’esprit que cette façon d’apprendre est nouvelle pour nombre de personnes, que la culture MOOC n’est pas encore ancrée dans le paysage francophone. Il est donc nécessaire que nous, acteurs du sujet, contribuions à clarifier, à expliciter, comme tu le fais avec ton site, pour rendre accessible au maximum l’abord des MOOC.

Effectivement la diversification des thématiques est également en train de se faire, progressivement. Elle suit le mûrissement des secteurs qui entrent dans la démarche. Ceci explique que les secteur informatique, web, marketing, communication aient été pionnier…

En ce sens je pense que le fait que des entreprises s’associent aux projet de MOOC va élargir le champs, avec notamment des propositions plus techniques. Plus de propositions artistiques seraient également les bienvenues…bref il existe une foule de thématiques à aborder pour les MOOC à venir

Plus précisément, le site MOOC francophone est ouvert depuis sept 2013, tu sors régulièrement des bilans trimestriels (le dernier mars 15), quelles observations fais-tu de l’évolution des MOOCers (les personnes qui participent à des MOOC), de l’évolution de leur pratique ?

168e3daJ’ai lancé le baromètre pour rétablir quelques vérités à propos des MOOC. Globalement, il est grand temps d’évaluer l’écosystème autrement que par le nombre d’inscrits, le taux de rétention… Nous n’avons rien à gagner dans ce « déballage » de chiffres et ce n’est certainement pas comme cela que l’on peut développer des concepts d’avenir.

En ce qui concerne les MOOCers, nous sommes passés d’un cercle d’initiés gravitant autour du monde de l’enseignement au grand public. Les besoins et les attentes sont donc différents et les apprenants du début sont devenus des utilisateurs exigeants.

De nombreuses études tentent de déterminer leur typologie pour mieux penser l’architecture des MOOC, c’est oublier que les MOOCers sont avant tout des personnes autonomes et responsables… peu réceptives aux stimulis du marketing de la formation. La création d’un tableau de bord personnalisé accompagnant l’apprenant tout au long de son parcours permettrait certainement d’en apprendre beaucoup plus que n’importe quelle enquête.

Il faudra certainement accepter aussi l’idée qu’un MOOC devienne un cours accessible toute l’année. Le format « évènementiel » classique avec une date de début et une date de fin est peu apprécié des nouveaux utilisateurs. Quid de l’accessibilité ?

On parle beaucoup de digitalisation des entreprises en ce moment… Penses-tu Jocelyne que les MOOC peuvent contribuer à cette transition numérique ?

0d8493bEffectivement, je laisse de côté les changements techniques et j’approche cette digitalisation des entreprises par l’aspect culturelle. Les habitudes de fonctionnements basée sur des modèles “d’avant” l’apparition du digital, (séparations des services, de l’information, maîtrise de l’information diffusée…) se trouvent profondément bouleversées par une culture digitale qui a des fondements différents (transparence, horizontalité, collaboration…)

Bref cette transition touche tous les services, tous les métiers, tous les niveaux de l’entreprise. Un article d’Usine nouvelle indique d’ailleurs que 90% des emplois nécessitent des compétences informatique et internet.

Et donc oui, je constate que le MOOC est un objet fédérateur et contribue à cette transition culturelle. En effet, il a des retombées positives interservices (Formation, RH/ communication/marketing/ SII…). De plus quelle que soit la thématique du MOOC, il contribue à une augmentation des compétences et de l’agilité digitale… tout cela participe de façon concrète aux évolutions culturelles et pratiques de la digitalisation d’une entreprise. Ceci impacte positivement sa performance et sa compétitivité.

Depuis quelques mois, des entreprises se sont déjà lancé dans l’aventure. J’en profite d’ailleurs pour lancer un appel à retour d’expérience…Je serais très heureuse via miss-mooc.paris de relayer ces retours. La mutualisation de ces expériences est importante.

Concernant les MOOC et les entreprises : on note actuellement un réel intérêt pour les MOOC et/ou leur déclinaison (SPOC, COOC…). Qu’en penses-tu ?

168e3daEffectivement les MOOC sont intéressants pour les entreprises puisqu’ils sont à la fois des outils de formation et de communication. Les deux ne sont pas incompatibles ;-)

En ce qui concerne les différents formats COOC, SPOC… tout dépend du volet social que l’on souhaite obtenir. Les échanges entre pairs ne sont pas forcément souhaités dans une entreprise, l’aspect collaboratif peut faire peur. De plus, le dispositif à mettre en place pour un MOOC est assez lourd, on peut donc pour ces différentes raisons préférer le format des SPOC

Justement Jocelyne, en parlant de l’aspect collaboratif des MOOC en entreprise, penses-tu qu’il est possible de favoriser ainsi le concept du « mieux travailler ensemble » ?

0d8493bTu touches là un sujet que je connais bien et qui me tiens particulièrement à coeur, tant pour les individus, que pour les entreprises.
Dans la continuité de la transition digitale, et des changements culturels qui de fait sont en cours, la dimension collaborative, voir de co-construction est forte. Le MOOC, et particulièrement le modèle du MOOC connectiviste (ex ITyPA) est là encore un objet qui favorise le collaboratif et impacte positivement le mieux travailler ensemble.

Imaginons un instant : des experts métiers transmettent leurs savoirs faire d’expérience au travers le MOOC de leur entreprise…que se passe t-il en terme de qualité de vie par le travail : pour eux c’est valorisant, voir formateur (“on apprend quand on transmet”), pour les collègues les messages perçus sont : demain ce peut être moi, je suis dans une entreprise qui fait des choses intéressantes… et côté entreprise, elle met en avant son expertise interne, elle dynamise ses professionnels en mettant leur expertise à l’honneur… à l’heure où il y a des fuites de compétences…

Vous voyez comment un MOOC devient un investissement très positif sur de nombreux plans ?

Le MOOC semblent être l’une des réponses aux besoins des entreprises et des collaborateurs pour la formation continue. A ton avis, en quoi la démarche MOOC (ses outils, ses modes d’évaluations, ses partages de savoirs verticaux et horizontaux…) peut contribuer aux évolutions actuelles des entreprises ?

168e3daL’ére du web 2.0 avec ces fonctions collaboratives et communautaires est en train de modifier de nombreux secteurs et métiers. Les entreprises sont de plus en plus confrontées à l’obsolescence des compétences de leurs collaborateurs. Il faudra certainement qu’elles mettent en place un dispositif pour mieux gérer les « potentiels » de ses salariés.

Si le choix est fait de créer des parcours de formations en interne sur des problématiques propres à l’entreprise, la démarche MOOC aura certainement un rôle important à jouer.

Je te retourne la question Jocelyne… N’est ce pas plutôt aux organisations et communautés professionnelles de trouver des ressources pour maintenir le niveau d’employabilité des salariés et des cadres ?

0d8493bChacun doit être acteur à son niveau… l’entreprise, les communautés professionnelles, les salariés. La réforme de la formation va en ce sens…dans l’esprit tout au moins (en pratique à ce jour les résultats ne sont pas encore là !) que chacun puisse être acteur de son employabilité… Là aussi il s’agit d’une transition culturelle à accompagner : passer de l’état passif (je prends ce que m’octroie mon entreprise) à un état d’acteur…je m’informe , je choisis, je construis mon évolution professionnelle !
Il y a un énorme travail d’outillage à réaliser !

En cela aussi l’arrivée des MOOC francophones contribue à élargir les possibilités pour les différents acteurs

Un questionnement que j’entends régulièrement concerne les LMS…Vaut-il mieux héberger un MOOC sur le LMS de l’entreprise ou sur une plateforme MOOC spécifique. Qu’en penses-tu ?

168e3daIl y’a des avantages et des inconvénients dans les deux solutions.

Héberger son MOOC permet de conserver son autonomie, c’est préférable lorsqu’on veut assurer une confidentialité des données ou développer des outils de tracking. Autre avantage, on garde une maîtrise totale de sa communication. Enfin, votre MOOC ne risque pas d’être noyé dans une masse de formations similaires et concurrentes

Sur une plateforme de MOOC, vous restez propriétaire de la formation et des données. Le principal avantage est l’accompagnement d’experts pédagogiques dont vous allez bénéficier pour la construction de votre MOOC. Coté communication, une plateforme offre déjà une visibilité sur le web, c’est donc une garantie d’avoir un minimum de participants.

Pour un premier MOOC il est préférable de choisir une plateforme pour plus de sérénité. Il vous faudra cependant choisir le bon prestataire. Pour une réédition ou la création d’un second MOOC, on peut privilégier l’auto-hébergement si l’entreprise possède bien en interne les compétences et le temps nécessaire pour la mise en place d’une formation de qualité.

 Penses tu qu’il est possible de développer dans une entreprise un modèle de MOOC centré sur l’esprit du partage, l’intelligence collective en échappant à toute forme de standardisation ?

0d8493bOui, car les entreprises sont en train de faire le lien entre l’esprit de collaboration, l’intelligence collective, l’innovation et leur compétitivité…

La compétitivité d’une entreprise est liée, à sa capacité d’innover… Et l’innovation n’a lieu que dans les environnements aux conditions propices à la faire émerger. Le facteur motivation et implication des salariés est évaluer à 50% comme pouvant contribuer à cette compétitivité !

Donc il va sans doute y avoir une période de mûrissement des MOOC d’entreprise mais tant pour les entreprises, que pour les salariés, c’est un magnifique “objet” pour contribuer à cela, pour le mettre en oeuvre concrètement et de MOOC en MOOC pour contribuer aux transformations culturelles nécessaires

Pour conclure, dans ce contexte d’innovation, quelles sont les perspectives qui se dessinent selon toi pour les mois à venir ?

168e3daLe principal frein à l’adoption des MOOC est incontestablement la reconnaissance de ce type de formation par les professionnels. Comment peut-on valoriser un MOOC dans un cursus de formation ? Il va falloir trouver des réponses adaptées…

Le format des MOOC doit également évoluer. Il doit encore s’adapter aux contraintes d’organisation des apprenants ou utilisateurs. Les plateformes vont devoir évoluer également pour rester compétitives. Les LMS traditionnels sont en train de combler leurs retards sur les fonctions collaboratives et sociales.

Enfin, il est nécessaire que l’apprenant puisse visualiser sa progression dans un MOOC, se situer par rapport aux autres participants, se positionner par rapport à ces objectifs initiaux… L’intégration d’un tableau de bord pour l’utilisateur devient indispensable. Il est clair que les apprenants ou utilisateurs vont à l’avenir privilégier les outils qui leur permettent réellement de visualiser et construire leur apprentissage.

Si les acteurs actuels ne savent pas répondre à cette attente, les utilisateurs se tourneront vers différents outils du web et formeront leurs propres communautés d’apprentissages.

A ton tour Jocelyne de faire un peu de prospective… En 2025, que seront devenus les MOOC ?

0d8493bTu nous emmène dans le futur là … ;-)
Pour moi ce qui est encore aujourd’hui un “phénomène MOOC” fera partie des outils à disposition, et je rêve qu’il soit naturel pour tout un chacun de se former tant par les contenus que par les communautés de MOOCers…
Leurs modèles économiques auront sans doute évolué.
Le plus important c’est qu’ils auront contribué à cette transition culturelle vers le digital et nous verrons certainement un tas d’innovations dans la façon de travailler, de collaborer ensemble auxquelles aujourd’hui nous ne pensons même pas…

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Merci Vincent pour ce riche échange en aller retour. Merci aussi pour ton site et belle suite dans tes projets

 


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