Et après le baccalauréat en psychologie ? Une approche pédagogique inspirante par Vox pop auprès de professionnels.
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Dans ce numéro spécial, la psychologue et professeure Marie-Josée Tremblay, de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR), présente, en collaboration avec Marie-Christine Loubert, étudiante au baccalauréat en psychologie, un projet d’innovation pédagogique qu’elle a conçu et mis en œuvre : le Vox pop « BACC vs DOC ».
Le contexte du projet
Dans le cadre du cours Sensibilisation aux pratiques de la psychologie (PSY1003), offert au 1er cycle en psychologie (UQAR), une capsule vidéo de type Vox pop a été conçue afin de présenter des parcours professionnels variés de personnes titulaires d’un baccalauréat en psychologie, répondant ainsi à un objectif de ce cours, soit d’exposer les personnes étudiantes aux différents choix de carrières reliées à la psychologie. Alliant authenticité et humour, cette initiative visait à capter l’attention des personnes étudiantes en abordant des enjeux sensibles tels que le stress lié au contingentement au doctorat et les incertitudes entourant les choix de carrière, tout en leur transmettant un solide bagage de connaissances (Emmerton et al., 2024 ; Jarrad et al., 2019 ; Scandurra et al., 2024 ; Sheldon et al., 2021). La littérature suggère une prévalence élevée des niveaux de stress (65%) qui nourrit la peur de l’échec chez la communauté universitaire, spécifiquement chez les personnes étudiantes de première année lors du premier trimestre (Horne et al., 2025 ; Jarrad et al., 2019 ; Turgeon et al., 2021). Les personnes étudiantes en sciences humaines surclasseraient même leurs collègues d’autres domaines d’études (McLafferty, 2022 ; Romo et al., 2019). Cette capsule vidéo s’inscrit dans une réponse pédagogique aux préoccupations exprimées par les personnes étudiantes du nouveau programme de psychologie de l’UQAR.
Les intentions pédagogiques
Pour ce projet, l’une des priorités était de concilier psychologie et pédagogie en visant à :
- Reconnaître et réduire les inquiétudes des personnes étudiantes face au processus hautement sélectif d’admission au doctorat et à l’incertitude de leur avenir professionnel en leur offrant un espace sécurisant pour réfléchir à leur parcours ;
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Favoriser leur motivation en renforçant leur capacité à se projeter dans l’avenir grâce à des informations concrètes et pertinentes.
Les moyens déployés
Lancé en 2023 sous forme de capsule vidéo maison et ayant reçu un accueil favorable, le projet a été bonifié à l’été 2024, avec l’aide d’un expert en audiovisuel. La capsule vidéo présente des témoignages de personnes titulaires d’un baccalauréat en psychologie, avec ou sans formation complémentaire, occupant différentes professions : agente de relations humaines, enseignante au collégial, éducatrice en services de garde, travailleuse sociale et physiothérapeute. Les entrevues ont été menées en région, dans des contextes variés (milieux de travail, espaces publics, en ligne). Elles visaient à refléter la diversité des trajectoires et des milieux de pratique, afin d’aider les personnes étudiantes à mieux se projeter dans un avenir professionnel qui leur ressemble. Le ton adopté, ainsi que le montage, sont volontairement accessibles et légers. Cette approche repose sur les principes de la pédagogie expérientielle et de la communication authentique (Duchatelet et al., 2024 ; Holflod, K., 2023). Elle intègre des facteurs associés à une meilleure gestion du stress, notamment la motivation intrinsèque, le plaisir et l’intérêt pour la matière (Brault-Labbé, A. et Dubé, L. 2010 ; Scandurra et al., 2024). Cette adaptation du style pédagogique, qui s’éloigne d’un enseignement plus traditionnel, combinée à un outil innovant, prépare les personnes étudiantes aux défis professionnels à venir et les aide à faire des choix éclairés.
Les impacts de l’innovation pédagogique sur les apprentissages des étudiantes et étudiants
Retombées sur les apprentissages
Jusqu’à présent, le projet a été présenté à deux cohortes de personnes étudiantes, totalisant environ 65 personnes. En plus de réaliser le relevé de littérature, l’étudiante, également deuxième autrice de cet article, a recueilli et consigné les commentaires des personnes étudiantes. Ces retours qualitatifs, obtenus par sondage et en classe, ont permis d’ajuster le contenu et de confirmer la pertinence de l’approche. Les retombées observées sont significatives. Les personnes étudiantes ont exprimé une appréciation marquée pour le format Vox pop, soulignant la pertinence des témoignages et l’effet rassurant du ton employé. Plusieurs ont rapporté une diminution de leur anxiété et un regain de motivation. L’utilisation d’un médium audiovisuel et d’un ton ludique (Darwich et al., 2025) a permis de susciter et de maintenir l’intérêt et l’attention des personnes étudiantes en tenant compte de plusieurs styles d’apprentissage et a ainsi facilité l’appropriation des connaissances. Ces résultats confirment l’intérêt d’intégrer des récits authentiques et des formats médiatiques engageants dans l’enseignement universitaire, particulièrement lorsqu’il s’agit de thématiques anxiogènes. Les personnes étudiantes ont pu élargir leur vision des carrières possibles, exprimant un sentiment accru de contrôle sur leur avenir. Cette démarche a permis de transformer un sujet potentiellement stressant en une exploration divertissante. En combinant l’écoute du Vox pop à un exercice d’introspection personnelle et à des discussions en classe, cette initiative pédagogique a permis aux personnes étudiantes d’envisager de nouvelles perspectives professionnelles, avec ou sans parcours de deuxième ou de troisième cycle.
Les impacts de l’innovation pédagogique sur les pratiques d’enseignement
Retombées sur les pratiques d’enseignement
Ce projet a permis à la professeure, à la tête de cette initiative, de renouer avec sa créativité professionnelle, parfois mise de côté dans le cadre plus normatif de l’enseignement universitaire. En tant que psychologue spécialisée en pédopsychiatrie, elle évolue dans un univers où le jeu est la clé du développement du lien de confiance et du mieux-être. Elle rappelle fréquemment aux personnes intervenantes et étudiantes qu’elle supervise que : … « les outils disponibles ne sont limités que par l’étendue de leur créativité et de leur capacité à s’adapter aux besoins uniques de l’enfant (Tremblay, 2025, p. 9-10)… » ; il devrait en être ainsi aussi pour l’enseignement.
Ce projet a optimisé ses pratiques pédagogiques en l’amenant à intégrer davantage le multimédia, en favorisant la collaboration interdisciplinaire et en recentrant son enseignement sur l’expérience vécue par les personnes étudiantes et leurs besoins. Il a renforcé sa conviction quant à l’importance de valider les émotions exprimées en contexte d’apprentissage et de proposer des moyens concrets pour y répondre. Cette expérience a ravivé son sentiment d’efficacité professionnelle et son engagement envers une pédagogie inclusive, bienveillante et ancrée dans le réel. Les retours des personnes étudiantes ont confirmé l’importance d’intégrer davantage d’humanité, d’humour et de diversité dans nos approches (Darwich et al., 2025 ; Holflod, 2023). Cette initiative pédagogique a permis de créer un espace d’apprentissage où la rigueur intellectuelle coexiste avec le plaisir d’apprendre, dans une perspective de littératie professionnelle et de reconnaissance des vécus personnes étudiantes.
Des conseils ou des réflexions à partager…
Conseils et pistes de réflexion
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Soyez créatifs avec peu de moyens : L’innovation pédagogique ne dépend pas des ressources, mais de leur optimisation et d’une compréhension fine des besoins des personnes étudiantes.
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Rendez l’apprentissage vivant : Intégrez, à la rigueur de votre enseignement, des témoignages et une touche d’humour afin de favoriser l’engagement et réduire l’anxiété.
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Collaborez pour enrichir : Misez sur la collaboration avec des collègues aux expertises complémentaires, notamment technologiques, et impliquez les personnes étudiantes afin de bonifier le projet de perspectives humaines et centrées sur les besoins.
Pour en savoir plus
Références
Brault-Labbé, A. et Dubé, L. (2010). Engagement scolaire, bien-être personnel et autodétermination chez des étudiants à l’université. Revue canadienne des sciences du comportement, 42(2), 80-92. https://doi.org/10.1037/a0017385
Darwich, L., DeBay, D., Forbes, L. et Mahfouz, J. (2025). Play, reflect, cultivate social and emotional learning : a pathway to pre-service teacher SEL through playful pedagogies. Frontiers in Education, 9(1). https://doi.org/10.3389/feduc.2024.1478541
Duchatelet, D., Cornelissen, F. et Volman, M. (2024). Features of Experiential Learning Environments in Relation to Generic Learning Outcomes in Higher Education : A Scoping Review. Journal of Experiential Education, 47(3), 400-423. https://doi.org/10.1177/10538259231211537
Emmerton, R. W., Camilleri, C. et Sammut, S. (2024). Continued deterioration in university student mental health : Inevitable decline or skirting around the deeper problems ? Journal of Affective Disorders Reports, 15, 100691. https://doi.org/10.1016/j.jadr.2023.100691
Horne, K. L., Bernes, K. B., Gunn, T. M. et Balderson, D. (2025). Canadian undergraduate students’ mental health literacy and its influence on psychological distress and help-seeking behaviour. International Journal of Mental Health, 54(2), 222-240. https://doi.org/10.1080/00207411.2024.2406936
Jarrad, T., Dry, M., Semmler, C., Turnbull, D. et Chur‐hansen, A. (2019). The psychological distress and physical health of Australian psychology honours students. Australian Psychologist, 54(4), 302-310. https://doi.org/10.1111/ap.12384
McLafferty, M., Brown, N., Brady, J., McLaughlin, J., McHugh, R., Ward, C., McBride, L., Bjourson, A. J., O’Neill, S. M., Walsh, C. P. et Murray, E. K. (2022). Variations in psychological disorders, suicidality, and help-seeking behaviour among college students from different academic disciplines. PLoS ONE, 17(12), 1-17. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0279618
Romo, L., Nann, S., Scanferla, E., Esteban, J., Riazuelo, H. et Kern, L. (2019). La santé des étudiants à l’université comme déterminant de la réussite académique. Revue québécoise de psychologie, 40(2), 187-202. https://doi.org/10.7202/1065909ar
Scandurra, C., Pizzo, R. et Freda, M. (2024). A concept analysis on academic psychological distress : implications for clinical practice. Current Psychology, 43(1), 32931-32960. https://doi.org/10.1007/s12144-024-06802-y
Sheldon, E., Simmonds-Buckley, M., Bone, C., Mascarenhas, T., Chan, N., Wincott, M., Gleeson, H., Sow, K., Hind, D. et Barkham, M. (2021). Prevalence and risk factors for mental health problems in university undergraduate students : A systematic review with meta-analysis. Journal of Affective Disorders, 287, 282-292. https://doi.org/10.1016/j.jad.2021.03.054
Tremblay, M.-J. (2025). La psychologie au service des enfants et des familles. Dans M.-J. Tremblay, M.-A. Guay Racine & A.-M. Lavoie (Dir.), Sensibilisation aux pratiques de la psychologie : Comprendre, guider et inspirer (p. 21–37). Presses de l’Université du Québec.
Turgeon, L., Ayotte, E., Thouin, É., Bellemare-Lepage, A. et Vaillancourt, J. (2021). La santé psychologique des étudiants universitaires : une analyse qualitative. Ordre des psychologues du Québec. https://www.ordrepsy.qc.ca/-/la-sante-psychologique-des-etudiants-universitaires-une-analyse-qualitative
Notice biographique
La Dre Marie-Josée Tremblay, psychologue, a œuvré plus de 25 ans en pédopsychiatrie. Professeure à l’UQAR et directrice de la Clinique universitaire de psychologie, elle se spécialise en enseignement clinique au doctorat. Lauréate des prix Louise-Dandurand (2024) et Lumières sur l’Innovation pédagogique (2025), elle s’illustre en recherche sur le développement des jeunes, la pleine conscience parentale et l’intelligence artificielle (IA). Conférencière invitée, elle a publié un récit de pratique dans la Revue internationale des technologies en pédagogie universitaire (2025). Le collectif qu’elle a dirigé et co-écrit, Sensibilisation aux pratiques de la psychologie : Comprendre, guider et inspirer, est paru aux PUQ en juin 2025.
Marie-Christine Loubert est étudiante au baccalauréat en psychologie à l’UQAR. Elle cumule plus de 15 ans d’expérience comme éducatrice spécialisée au sein de divers organismes en santé mentale de la région de Rimouski. Forte d’un parcours professionnel diversifié en intervention de crise, en réintégration socioprofessionnelle et en accompagnement psychosocial en contexte judiciaire, elle souhaite poursuivre des études doctorales afin de pratiquer comme psychologue au Bas-Saint-Laurent.
Cette capsule est une production de la Direction du soutien aux études et des bibliothèques (DSEB) en collaboration avec le Groupe d’intervention et d’innovation pédagogique (GRIIP)
Rédaction : Marie-Josée Tremblay et Marie-Christine Loubert
Comité éditorial : Claude Boucher, Geneviève Demers, Marie-Ève Gonthier, Alain Huot, Naïma Tebourbi
Coordination : Marie-Ève Gagnon-Paré
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