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Doctorat : et si on jouait « collectif » ?

Un article repris de http://theconversation.com/doctorat...

Désormais, les doctorants doivent aussi apprendre à vulgariser leurs recherches. (Ici à l’Education University of Hong-Kong) Lisa Jeanson, Author provided

Le doctorat, bien plus que la réalisation d’une thèse ? Pour ceux qui vivent ce parcours au quotidien, cela ne fait pas l’ombre d’un doute. Au-delà de la rédaction d’un travail au long cours et de la construction d’une expertise scientifique, cette expérience de trois à cinq ans permet de développer des compétences très précieuses aussi pour le monde de l’entreprise, de l’autonomie à la gestion de projet, en passant par la définition d’une stratégie.

Pourtant, beaucoup se représentent encore les chercheurs en herbe comme d’éternels étudiants cantonnés à leurs bibliothèques ou laboratoires, en face à face permanent avec un sujet de prédilection très pointu. Comment casser ces clichés ? Que les doctorants témoignent plus souvent sur les défis qu’ils relèvent serait en soi un bon départ. C’est ainsi que nous avons décidé de raconter l’expérience qui suit, qui nous a menés bien loin de notre univers habituel. Jusqu’à Hong-Kong même !

Saisir des opportunités

Tout a commencé en 2017, lors de la la Journée internationale des jeunes chercheurs, organisé par l’université de Lorraine. Constatant notre implication dans cet événement, Dominique Macaire, professeure en didactique des langues dans l’un des laboratoires de l’établissement, nous propose de rebondir vers un autre projet, tourné vers l’Education University of Hong Kong (EduHK). L’enjeu : renforcer le dialogue avec l’école doctorale de cet établissement, avec lequel se mettent en place de nouveaux échanges.

En confrontant nos expériences et nos besoins dans chacune de nos disciplines, nous déterminons un axe de travail qui nous semble essentiel face aux enjeux de diffusion de la recherche : l’art oratoire. Le résultat prend la forme d’un atelier participatif que testent une quinzaine de doctorants de l’EduHK invités en avril 2017. Les séances de coaching se clôturent par un concours façon « Ma Thèse en 180 secondes », où les candidats présentent leurs travaux en 3 minutes, avec l’appui d’un support visuel, devant un jury.

Et nous ne regrettons pas d’avoir saisi l’opportunité offerte par Dominique Macaire, puisque l’expérience nous a valu une invitation à l’International Postgraduate Roundtable and Research Forum cum Summer School (IPPRFSS) 2017 à l’EduHK. Durant plusieurs jours, les doctorants y présentent leurs travaux et participent à des conférences et tables rondes les amenant à pratiques de la recherche. Très apprécié, notre atelier est reconduit pour l’édition 2018 de l’IPPRSS.

Apprendre à communiquer

Faire passer le projet avant tout, même avant l’ego, en voilà un challenge de taille pour six chercheurs en herbe, avec des personnalités différentes, des niveaux d’expérience variés et des compétences multiples à concilier sur plusieurs mois et à des kilomètres les uns des autres. Malgré nos méthodes de travail assez éloignées, nous avons trouvé des compromis, constitué des groupes, établi un planning de réunions…

En résulte l’atelier « Build Your Own Brand », qui embrasse les outils et méthodes pour construire des « présentations visuelles » efficaces, mais aussi des conseils autour de la mise en scène du texte et le langage gestuel. Oublier le trac qui précède ses interventions, passer outre les craintes que certains peuvent ressentir lors d’une présentation dans une langue étrangère, être irréprochable dans le design de son PowerPoint, vulgariser ses travaux de recherche : c’est l’objet de notre atelier… mais c’est aussi ce que nous devons nous-mêmes mettre en œuvre pour asseoir notre crédibilité. En effet par exemple parler une autre langue peut être un vrai défi ! Dans sa langue maternelle, il est plus facile de convaincre, de faire face à des oublis ou de rebondir sur des remarques si besoin est. En revanche lorsqu’on s’exprime dans une langue étrangère, il faut être imaginatif et savoir s’adapter !

Heureusement pour faire face à ces challenges nous ne sommes pas seuls et, une fois encore, c’est le collectif qui gagne. Nous improvisons chaque soir durant près d’une semaine des séances de travail tardives dans les salles de réunions du campus. Nous orchestrons notre intervention et répétons ensemble comme une troupe de théâtre.

Gérer budgets et plannings

Il a fallu aussi jouer collectif pour financer notre voyage, à hauteur d’environ 1 000 euros par personne, ce projet n’entrant ni dans le cadre de nos doctorats ni des financements de l’université. C’est à force de démonstrations de nos compétences en tant que communicants, de notre sérieux en tant que chercheurs que nous sommes parvenus à construire une relation de confiance avec nos partenaires et obtenons finalement le soutien des Écoles Doctorales Stanislas et RP2E, des Laboratoires PErSEUs, LIEC et INRA et du parcours « Compétences pour l’entreprise » labellisé par la Confédération des Directeurs d’Écoles d’Ingénieurs.

Au-delà de ces questions de budget, nous avons aussi dû nous initier à cette flexibilité si essentielle pour le monde de l’entreprise. On imagine souvent que, dans la recherche, les conditions de travail sont très différentes de celles du privé et que les projets s’inscrivent systématiquement sur du moyen ou du long terme. Pourtant, il faut bien réagir lorsque l’on doit modifier très vite le format d’une intervention suite à des demandes impromptues de la part des organisateurs d’un colloque.

S’adapter, tel est le maître mot que nous avons suivi. En effet, notre public étant essentiellement composé de doctorants, nous nous devions d’être pédagogues et de trouver le moyen de capter l’attention d’une centaine de personnes pendant 3 longues heures. Susciter l’esprit de compétition du public avec un quizz et de petits gains à la clé, rendre l’audience active en mettant en place des exercices collectifs, impliquer l’audience dans le remaniement en direct de leurs propres PowerPoint, telles ont été nos solutions.

Du doctorat au leadership, il n’y a qu’un pas et cette expérience hors du commun nous a permis de le franchir, au moins en partie. Bien au-delà de nos compétences de recherche, nous avons su nous dépasser et mettre de côté nos doutes et parfois notre ego pour mener à bien un projet d’une telle envergure. Nous pensions être venus pour former nos pairs et nous rentrons grandis, plus au fait de nos défauts, plus conciliants, plus prêts que jamais à affronter les aléas du travail, et ce, bien au-delà du monde de la recherche.

The Conversation

Alexis Olry a reçu des financements de l’Université de Lorraine.

David Gocel-Chalte a reçu des financements de l’équipe de recherche Cyble, laboratoire LIEC UMR 7360, CNRS.

Jérémy Filet, Laura Déléant, Lisa Jeanson et Marie Dincher ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.

Licence : Pas de licence spécifique (droits par défaut)

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