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Bâtisseurs de possibles : des projets qui donnent confiance aux élèves

Un article repris de http://theconversation.com/batisseu...

Le travail de groupe aide les élèves à développer des compétences sociales, mais aussi à prendre confiance en eux-mêmes. Bâtisseurs de possibles/Judith Grumbach, Author provided

Dans un monde qui change à la vitesse grand V sous le poids croissant des technologies, comment rester dans la course et renouveler ses savoir-faire ? Misons sur l’intelligence collective et développons le travail en équipe, répondent de plus en plus d’établissements du supérieur et d’entreprises. C’est ainsi qu’est né à Stanford dans les années 80 le design thinking, une méthode de résolution de problèmes qui permet de croiser des expertises d’horizons variés, de l’ingéniérie à l’art, en passant par le management.

Le nombre d’étapes peut varier mais, dans tous les cas, il s’agit de partir des besoins des personnes concernées. Le processus est-il transposable dans l’univers scolaire, où priment les apprentissages individuels ? À Ahmedabad, en Inde, Kiran Bir Sethi a montré que c’était possible : avec Dispositif for Change, ses élèves réalisent des projets à partir de problématiques qui les touchent. Porté par le réseau d’enseignants Synlab, le réseau d’enseignants « Bâtisseurs de possibles » est l’adaptation de cette démarche au contexte scolaire français.

Il existe d’infinies variantes à un projet « Bâtisseurs » tant le thème et le contexte de la démarche peuvent différer d’une classe à autre. La classe de Sara Horte à Beaulieu-sous-la-Roche s’est par exemple attaquée à la pollution des déchets, comme le montre le court-métrage de Judith Grumbach, Il n’y a pas d’âge pour changer le monde, sorti en 2018. L’occasion de se pencher sur les bienfaits du travail en équipe.

“Comment agir sur le monde qui nous entoure alors que l’on n’a pas 18 ans ?”

Un échange de savoir-faire

Ces approches de Design Thinking, que l’on voit à l’œuvre dans la démarche « Bâtisseurs de possibles », s’appuient sur des logiques éducatives anciennes. Elles sont principalement issues des travaux de John Dewey (1859-1952), philosophe et pédagogue américain, auteur d’une formule devenue célèbre : « learning by doing ». De l’œuvre pédagogique de John Dewey, on retient principalement aujourd’hui les démarches de projet qui consistent à convaincre les participants de l’importance de leur engagement, même modeste. L’enjeu du travail en équipe n’est pas tant de se répartir les tâches que de pouvoir mutualiser des compétences diversifiées.

En coopérant, les élèves vont donc pouvoir :

  • acquérir des compétences transversales, qu’ils pourront valoriser dans des environnements et des disciplines différents : prendre la parole en public, rédiger un compte-rendu, inscrire son action dans une collaboration…

  • réaliser des transferts d’apprentissages, c’est-à-dire réutiliser dans des contextes inédits des savoirs scolaires découverts par le biais de leçons et d’exercices – et donc les consolider. Il peut s’agir d’accorder les participes, de tracer le patron d’un solide, de repérer les limites des énergies fossiles, de comprendre un texte en anglais…

Associée à des pédagogies cohérentes, cette façon d’organiser le travail des élèves est en mesure d’améliorer le sens de l’activité scolaire des élèves et de participer à la construction de relations solidaires.

Un impact sur la motivation

Qu’il s’agisse de formats ouverts comme « Bâtisseurs de possibles » ou de dispositifs portant sur une thématique définie au préalable, l’apprentissage par projet permet d’augmenter l’implication de l’élève, de développer la coopération, mais également d’améliorer la qualité des apprentissages.

Mais apprendre de manière transversale en contextualisant plusieurs compétences et connaissances disciplinaires n’est pas seulement intéressant du point de vue de la motivation et des apprentissages. Quelques études montrent également que de tels dispositifs permettent d’augmenter le sentiment d’efficacité personnelle (SEP) des élèves. Le SEP désigne les croyances d’un individu quant à sa capacité à réaliser une tâche, un apprentissage, un défi ou un changement avec succès.

Un élève au SEP élevé se sentira ainsi capable d’exercer un contrôle sur les événements en mobilisant sa motivation et des ressources cognitives, tout en mettant en place des actions nécessaires à l’atteinte de ses objectifs. Cette dimension a une influence forte sur les choix d’activités des élèves, leur investissement à l’école, la persistance de leurs efforts et leurs réactions émotionnelles face aux obstacles. Assez logiquement, les progrès du SEP influencent aussi la progression des résultats scolaires.

Une autre posture pour les profs

Le SEP est au centre de l’apprentissage par projet, et notamment du dispositif « Bâtisseurs de possibles », puisque les élèves choisissent le projet sur lequel ils vont travailler et utilisent des savoirs disciplinaires dans de nouveaux contextes, ayant ainsi des opportunités supplémentaires de prendre confiance en leur capacité à faire des choses, à réussir.

C’est d’ailleurs ce que nous avons pu montrer dans une recherche-action réalisée cette année auprès d’élèves ayant mené un projet Bâtisseurs de possibles. Ces résultats permettraient de confirmer l’intérêt de ce type de démarche pour favoriser l’apprentissage des élèves. Même si cela ne constitue qu’une première étude dont il faudra confirmer les résultats, ces observations sont cohérentes par rapport à la structure même du dispositif, mais aussi par rapport aux retours que les enseignants nous font depuis que le dispositif existe en France.

Cependant, il n’est pas toujours facile de mettre en place ce genre de dispositif. Au-delà de la confiance de l’enseignant dans les capacités des élèves à aller au bout de la démarche, l’apprentissage par projet nécessite de changer de posture (passage à un rôle de facilitateur), mais aussi de mettre en place un climat favorable à la collaboration, ce qui n’est pas toujours simple. De plus, il faut pouvoir intégrer des apprentissages du programme au projet, tout en s’assurant du niveau de difficulté des tâches réalisées par les élèves et du niveau d’autonomie de ces derniers. Mais une fois ces problématiques dépassées, les bénéfices sont au rendez-vous, pour les élèves comme pour leurs profs.


Article rédigé à plusieurs mains par Bastien Wagener, Sylvain Connac et l’équipe du réseau Bâtisseurs de possibles (Alexia Dugény, Sara Horte, Katarina Kordulakova)

The Conversation

Sylvain Connac ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son poste universitaire.

Licence : Pas de licence spécifique (droits par défaut)

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