L’hybridation des formations est passée d’une solution de crise à une modalité pédagogique pérenne. Cependant, sur le terrain, l’expérience est souvent déceptive. Les participants à distance se sentent comme des spectateurs de seconde zone, l’enseignant jongle avec une technique complexe, et l’interactivité promise reste un vœu pieux.
Fort de nos observations, voici 10 points fondamentaux à considérer pour construire un environnement qui fonctionne.
1. L’audio, pilier de l’inclusion
On ne le répétera jamais assez : un étudiant pardonnera une image de qualité moyenne, mais jamais un son inaudible. La question centrale est : "Est-ce que l’étudiant à distance entend aussi bien les questions de ses camarades en salle que les propos de l’enseignant ?". Des microphones de plafond qui captent l’ensemble de la salle sont indispensables. Des technologies comme les dalles micro (type Shure MXA920) ou l’utilisation de protocoles audio sur réseau (Dante) permettent de résoudre ce problème en assurant une captation claire et en réduisant les bruits parasites, mais demandent une véritable expertise à l’installation.
2. Les écrans de retour : voir pour être vu
Un enseignant qui doit constamment se retourner vers son ordinateur portable pour voir ses étudiants à distance brise le contact visuel et la dynamique du cours. L’installation d’écrans de retour ou vidéoprojecteur en fond de salle est un changement radical. Ils permettent à l’enseignant de voir ses étudiants distants d’un simple coup d’œil et, tout aussi important, ils permettent aux étudiants en présence de voir leurs camarades, créant ainsi le sentiment d’une seule et même classe.
3. Le partage de contenu : ne jamais filmer un tableau
Filmer un vidéoprojecteur ou un tableau blanc est une pratique qui devrait être proscrite. La lisibilité est médiocre et l’expérience frustrante. L’hybridation réussie passe par le partage numérique natif du support de cours. L’utilisation d’un tableau blanc interactif (TBI) est une solution efficace, car ce qui y est écrit ou annoté est directement visible en haute définition par tous, et peut être sauvegardé. On peut également partager le flux vidéo d’un vidéoprojecteur, avec un système dédié.
4. L’interactivité distante
Comment un étudiant à distance peut-il "passer au tableau" ? La technologie doit le permettre. Des applications de tableau blanc (comme celle intégrée à la solution Kalyzée, Miro, ou d’autres) autorisent la co-annotation. L’étudiant distant peut alors, depuis son ordinateur, écrire, dessiner ou présenter un document sur le TBI de la salle, au même titre qu’un étudiant en présence. C’est un facteur d’engagement et d’équité essentiel.
5. La console de pilotage doit être simple et intuitive !
L’adoption d’un dispositif par les enseignants est directement corrélée à sa simplicité. Une console de pilotage surchargée de boutons et de termes techniques est un repoussoir. L’interface de gestion de la salle doit être pensée pour un pédagogue, pas un ingénieur du son. L’idéal : une tablette tactile avec des boutons aux intitulés clairs ("Démarrer le cours", "Partager mon écran", "Lancer un sondage"). Le reste doit être automatisé.
6. L’automatisation des tâches rébarbatives
Le démarrage et la fin du cours sont des moments critiques. Le formateur doit-il lancer 3 logiciels différents, se connecter à plusieurs plateformes, allumer chaque équipement ? Une salle fonctionnelle automatise ces processus. L’enseignant s’identifie, la session se lance, les caméras s’activent, l’enregistrement démarre, et tout s’éteint à la fin. Le gain de temps et la réduction de la charge mentale sont considérables.
7. Le logiciel de diffusion : la visioconférence n’est pas toujours l’amie de la pédagogie
Les plateformes comme Teams ou Zoom sont conçues pour des réunions, pas pour orchestrer l’asymétrie d’une salle de classe. Elles peinent à gérer plusieurs flux vidéo de manière fluide (caméra prof, caméra salle, partage d’écran). Des logiciels dédiés à la formation hybride (comme le propose Kalyzée si elles sont bien intégrées) sont souvent plus robustes car ils sont pensés pour le streaming et la gestion de ces multiples flux, offrant une expérience plus qualitative et stable.
8. L’intégration au LMS : créer un parcours sans couture
La salle comodale ne doit pas être un silo. Elle doit s’intégrer à l’écosystème de l’établissement, et en premier lieu au Learning Management System (Moodle, 360Learning, etc.). L’enregistrement du cours doit pouvoir être publié automatiquement dans l’espace de cours correspondant, l’émargement des distants synchronisé, et les ressources accessibles en un clic.
9. L’aménagement de l’espace physique
La disposition des tables, l’acoustique de la pièce, l’éclairage... Ces éléments sont fondamentaux. Une salle avec une forte réverbération rendra les meilleurs microphones inefficaces. Un éclairage qui crée des contre-jours rendra le visage de l’enseignant invisible. Un audit de la salle par des professionnels est souvent une étape préliminaire indispensable.
10. La formation et l’accompagnement des usagers
Enfin, le point le plus important : l’humain. Le meilleur matériel du monde sera inutile si les enseignants ne sont pas formés et accompagnés. Cette formation ne doit pas être uniquement technique ("appuyez sur ce bouton"), mais avant tout techno-pédagogique ("voici comment vous pouvez utiliser cet outil pour faire des travaux de groupe mixtes"). C’est un enjeu de conduite du changement. De même, une courte session de prise en main pour les étudiants en début d’année peut faire toute la différence.
En synthèse, construire une salle comodale fonctionnelle est un projet d’intégration où la technologie doit s’effacer au profit de l’usage. Plutôt que d’empiler des appareils, il s’agit de penser un écosystème cohérent où chaque élément, de l’audio à l’intégration LMS, sert un seul but : une expérience d’apprentissage équitable et fluide pour tous. La vraie réussite se mesure quand l’enseignant oublie la technique pour se consacrer entièrement à sa pédagogie.
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