Innovation Pédagogique et transition
Institut Mines-Telecom

Une initiative de l'Institut Mines-Télécom avec un réseau de partenaires

Position et variations des positions dans la construction d’une posture de chercheur

Marcel Plenchette
Laboratoire FoAP Cnam Paris
mplenc@outlook.fr

Introduction

Nos activités de praticien-chercheur nous ont conduit à nous interroger sur les variations de postures auxquelles se trouve soumis le chercheur (Plenchette M. , 2016). Nous proposons d’aborder les variations de postures comme une dynamique d’ajustement postural intrinsèquement liée à la démarche d’enquête (Dewey, 1993). La position première, envisagée comme la plus opérante au regard de l’objet étudié, est soumise dans l’approche empirique à des tensions qui vont la faire osciller vers d’autres positions. Ces oscillations, l’observation qui en est faite et leur gestion constituent une dynamique d’ajustement permanente.
Nous mobiliserons le terme de posture, terme ancien (1588) selon le Grand Robert de la langue française, utilisé couramment dans le registre médical et en sciences de l’éducation (Paul, 2004) notamment quand il est associé au terme de position (Ardoino, 1990). Nous retiendrons la définition proposée par Alphandéry et Bobbé de la posture comme « la position que le chercheur occupe au regard de ses objets de recherche, de ses interlocuteurs, de son terrain, et enfin de ses pairs et des institutions qui structurent son activité. » (Alphandéry & Bobbé, 2014, p. 7)

La dynamique d’ajustement postural

Cette dynamique faite de rupture, d’équilibre, de prise de conscience, de recentrage constitue un fil conducteur dans l’évolution de la position qu’occupe le praticien-chercheur au regard de ses objets. Notre objet de recherche résiste à notre compréhension et nous sommes amenés comme le suggère Georges Devereux à nous « examiner nous-même pour comprendre ce qui fait obstacle à notre compréhension » (Devereux, 1980)
Cette variation de postures n’est pas uniquement le fait du choix du chercheur. Celui-ci peut être mis dans une posture non choisie. Il sera d’une certaine manière « agi » par son ou ses interlocuteurs, le poussant vers des positions qui méritent d’être identifiées, observées, discutées. Chaque position vient questionner la relation qu’entretient le chercheur avec ses interlocuteurs, notamment lorsqu’il s’agit de recherches partenariales et collaboratives.

La recherche partenariale participative

Comment dénommer le type de recherches sur lequel nous allons faire porter notre argumentaire. S’agit-il de recherche-action ? De recherche-participative ? De recherche-action collaborative ? De recherche partenariale collaborative ? De recherche partenariale participative ?

Recherche action (Reason & Bradbury, 2002)
Pasmore (2002) et Levin et Greenwood (2002) soulignent l’importance de Dewey dans l’apparition de la recherche-action, sans pour autant qu’il utilise cette terminologie. Ils y voient l’influence du pragmatisme américain considérant la construction du savoir comme un processus intégré, liant réflexion et action. Le savoir généré dans l’action et l’expérimentation serait doté d’une grande crédibilité pour les acteurs, auteurs des connaissances produites. La démocratie participative chère aux yeux de Dewey (2011), permet de lier l’éthique de participation aux processus de création de savoir. Nous pouvons dire que pour Dewey, se conduire de façon humaine, c’est s’engager dans la recherche pour améliorer ses conditions de vie. Le terme de recherche-action est attribué à Kurt Lewin (Lewin, 1959). Avec lui, c’est l’idée de gestion du changement social qui se développe. La recherche-action est alors associée au processus de changement, notamment dans les programmes sociaux, du moins à ses débuts. Pour l’auteur, seul l’approche participative est productrice de changements. Depuis cette période de l’après-guerre la démarche ne cessera d’évoluer et sera redéfinie à de multiples reprises. En 1986, le colloque de l’Institut National de Recherche Pédagogique (INRP) partira de la définition, citée par Hugon et Seibel (1988, p. 13), «  Il s’agit de recherches dans lesquelles il y a une action délibérée de transformation de la réalité ; recherches ayant un double objectif : transformer la réalité et produire des connaissances concernant ces transformations ». Pour René Barbier, la recherche-action va transformer la manière de concevoir et de faire de la recherche en sciences humaines. Pour l’auteur, la recherche-action « débouche sur une nouvelle posture et une nouvelle inscription du chercheur dans la société, par la reconnaissance d’une compétence à la recherche de praticiens du social » (1996, p. 7). Le chercheur en s’engageant dans ce type de démarche, dépasse les références monodisciplinaires. « Il est parfois sociologue ou psychosociologue ou philosophe ou psychologue ou économiste ou inventeur ou militant etc. » (1996, p. 8). Il y donc une variation de postures « Le chercheur en recherche-action n’est ni un agent d’une institution, ni un acteur d’une organisation, ni un individu sans appartenance sociale, par contre il accepte éventuellement ces différents rôles à certains moments de son action et de sa réflexion. Il est avant tout un sujet autonome et plus encore un auteur de sa pratique et de son discours  » Le développement de la recherche-action s’inscrit dans un mouvement international. Aux États-Unis, pays d’adoption de Lewin, en Europe mais également dans les pays d’Amérique latine (Anadón & Savoie-Zajc, 2007). « C’est cette dernière appellation, Recherche-action-participative, qui a été consacrée dans les écrits du domaine à partir du Symposium international qui s’est tenu à Cartagena (Colombie) en 1977 et sous l’influence des travaux de Fals Borda  » (2007, p. 21)

Recherche participative (Anadón, 2007)
La recherche participative a été définie dans le cadre de la charte des sciences et recherches participatives comme une forme de « production de connaissances scientifiques auxquelles participent, avec des chercheurs, des acteurs de la société civile, à titre individuel ou collectif, de façon active et délibérée. » (2017) Cette charte détaille les valeurs partagées, les principes déontologiques et d’intégrité scientifique, ainsi que les conditions de réussite de projets de recherche participative . Elle est issue du rapport de François Houllier sur « Les sciences participatives en France », remis en février 2016 sur demande du ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Celui-ci fait le constat d’une évolution importante des rapports que la science entretient avec la société au cours des dernières années. « La science n’est plus le monopole de chercheurs experts mais de plus en plus appelée à être conçue comme un bien commun qui mérite à ce titre d’être gouvernée, mise en œuvre, utilisée par la société civile ». Cette conception de la science se développe sous des intitulés divers : sciences citoyennes, sciences participatives, sciences collaboratives, citizen-science, community-based science, recherche-action-collaborative (Les chercheurs ignorants, 2015), recherche impliquée, recherche participante, participative, partenariale collaborative (Gillet & Tremblay, 2017). La science ne serait plus le monopole d‘experts.
La désignation du type de recherche, participative, tente de souligner la place qui sera accordée à chacun des acteurs. Est-ce de la collaboration, de la participation ? S’agit-il d’une relation de partenariat ? Comment définir la relation et la place des différents acteurs ? Les places sont-elles figées ou mobiles ?

Recherche action collaborative (Les chercheurs ignorants, 2015)
Gilles Monceau (Les chercheurs ignorants, 2015) note que le terme de recherche-action collaborative est redondant mais il souligne dans le même temps une dimension importante, à savoir que « toute participation à une recherche-action ne signifie pas nécessairement une collaboration, c’est-à-dire un travailler ensemble. La participation à un dispositif de recherche peut en effet prendre de nombreuses formes allant d’une présence muette lors d’une rencontre à une collaboration aux différentes étapes de la recherche, de sa conception à la diffusion de ses résultats ». Cette observation nécessite de clarifier le niveau d’engagement des participants y compris celui du chercheur.
A quel moment l’acteur intervient-il ? à une étape de la recherche, à toutes ? Chaque participant vise-t-il les mêmes finalités ? La démarche possède-t-elle une dimension émancipatrice ? Comment s’inscrit-elle dans les dynamiques de construction identitaire ? Quelles seront les modalités de collaboration entre chercheur(s) et acteurs aux différentes étapes du processus ? « Certaines recherches, par exemple la recherche-action ou la recherche évaluative n’ont pas pour fin la théorisation, mais la décision dans un contexte particulier en vue de l’action » (Baribeau, 2009) Il y a donc plusieurs niveaux de collaboration inscrit selon Audoux et Gillet (2011) dans une série d’épreuves « qui analysées dans un double cadre de la traduction (Callon, 1975) (Latour & Woolgar, 2006) permettent d’établir à des degrés divers les conditions d’une co-construction des savoirs ».

Recherche partenariale collaborative (Gillet & Tremblay, 2017)
Cette désignation cherche à expliciter le type de relation que l’on souhaite instaurer avec les différents participants à la recherche. La notion de partenariat mérite d’être alors précisée et nous soulignerons son importance quant à la position qu’elle suggère.

Partenariat ou « la construction négociée d’une action commune »


« Le partenariat peut être défini comme une « coopération étroite » ; il résulte d’une entente réciproque entre des parties qui, de façon volontaire et en principe de manière à peu près égalitaire, partagent un objectif commun et le réalisent en utilisant de façon convergente leurs ressources respectives (voir notamment Landry et Serre, 1994, p. 14). Dans un grand nombre de définitions, le partenariat renvoie souvent à une « action commune négociée », ce qui implique la reconnaissance d’une division, d’une différence, d’une possible confrontation des parties impliquées, d’une tension qui est précisément dépassée par la construction négociée d’une action commune  ». (Gillet & Tremblay, 2017, p. 312)
La construction des places et de l’engagement de chacun des partenaires se construit de manière permanente. Elles ne sont pas définies au départ et ensuite figées. Le niveau d’engagement peut varier en même temps que vont varier les positions. Si pour Gillet et Tremblay, pour parler de partenariat, il doit y avoir un engagement véritable, une réelle implication des acteurs sociaux dans le cadre de la recherche (2017, p. 312), nous observons que dans la mise en œuvre, le déroulement de la recherche, l’implication et le niveau d’engagement varie, se renégocie tout au long du parcours de recherche. La négociation porte sur tous les aspects et à toutes les étapes de la démarche. De l’objet de la recherche aux formes de communication en passant par la méthode utilisée. Qui fait quoi ? qui apporte quoi ? Quels accords sont trouvés ? pour combien de temps ?
La participation à la recherche produit-elle des changements, des transformations dans la « posture de chercheur » de chacun des partenaires (Plenchette M. , 2020) ?
La relation de partenariat s’inscrit dans une reconnaissance réciproque où se conjugue incertitude, confiance et engagement. « L’engagement dans le processus de partenariat est décrit comme un saut dans l’incertain, les protagonistes doivent faire face à un développement imprévisible des circonstances et s’exposer à des conséquences qu’ils ne peuvent spécifier. Le contexte est mouvant, il oblige chacun à s’ajuster constamment pour pallier les différents incidents. Les partenaires « font confiance au processus de travail qu’ils établissent en commun  » (Béguin & Cerf, 2009) au sens où ils ont « confiance dans le devenir scientifique d’une telle relation » (Thiery & Cerf, 2009). » (Seferdjeli & Stroumza, 2017, p. 87)
Les différents partenaires accordent aux praticiens-chercheur(s) l’expertise des méthodes de recherche et « un savoir en fonctionnement » (Friedrich, 2010) du monde de la recherche. Le chercheur reconnait et respecte les savoirs d’expérience de leurs partenaires.
La relation de partenariat est soumise à la dynamique circulaire du processus de recherche qualitative. Loin d’un fonctionnement linéaire ou sériel, la dynamique peut être vue comme une trajectoire hélicoïdale (Glaser B. , 2001). Le parcours de recherche sera constamment soumis à des allers-retours d’une activité de recherche à une autre. « Toute la dynamique de la recherche consiste à préciser et à affiner en même temps et en interrelation : la question de recherche, l’unité d’analyse, le domaine d’investigation empirique, les propositions théoriques. La dynamique de la recherche procède par boucles successives… » (Dumez, 2013, p. 25). Cette démarche itérative produit de l’incertitude chez les chercheurs-novices. Celle-ci va à la fois supposer une relation de confiance afin de se laisser guider et accepter pour soi-même des transformations qui vont s’opérer dans un processus d’appropriation des démarches de recherche. Les effets transformateurs (Plenchette M. , 2020) de la participation à une recherche partenariale et collaborative, pour une grande part en lien avec les dynamiques de construction identitaire, font-ils partie des finalités de la recherche ? Les différents partenaires savent-ils vraiment à quoi et dans quoi ils s’engagent ? Ces effets transformateurs que nous avons observés n’ont rien de certain. Nous ne sommes pas en situation « d’obligation de résultats » ni en situation de désirer à la place de l’autre des transformations qui seraient « bonnes » pour lui. Il s’agit d’une expérience sociale (Dubar, 1998) où se développent des gestes d’apprentissage du soi (Dubost & Lévy, 2002, p. 412). Nous nous engageons dans une réflexion en action sur l’action négociée dans un mouvement que Heron et Reason (1997) nomment « l’intersubjectivité critique ».

Choisir une appellation

Le choix de désigner le type de recherche dans lequel nous nous engageons suppose un positionnement quant au type de relation que l’on envisage avec les acteurs participant à la recherche. Cette réflexion sur le positionnement est une réflexion sur les différentes positions présentes en même temps et soumises à variations.
Notre choix a évolué en même temps qu’à évoluée notre réflexion sur les variations de positions en jeu dans les situations de négociation en cours d’action.
Nous retiendrons la proposition développée par Gillet et Tremblay de « recherche partenariale et collaborative » parce qu’elle correspond au souhait de se situer dans une relation de partenaire et pas seulement de prestataire. Cette position souligne l’engagement de chacun dans des activités de collaboration.

Une « ficelle » pour construire sa posture de praticien-chercheur

L’association des mots de praticien et de chercheur renvoie à l’idée d’un espace d’interactions entre une activité de recherche et une activité sociale, professionnelle, autre. « Être praticien-chercheur signifie que l’activité professionnelle génère et oriente l’activité de recherche, mais également que l’activité de recherche ressource et nourrit l’activité professionnelle. Devenir praticien-chercheur correspond à la construction d’une double identité par une double appartenance : un praticien qui cherche et un chercheur qui pratique. » (Ponthier, 2015)
Pour Bourgeois, le praticien-chercheur doit apprendre à « penser contre soi » en développant ses capacités de distanciation dans des « conditions a priori moins propices à la distanciation, puisque le chercheur est lui-même engagé comme acteur dans la réalité sur et dans laquelle il tente d’exercer cette démarche » (2004, p. 7).
La double appartenance citée par Ponthier se joue également en termes d’appartenance à une communauté de pratiques, pour nous, celle de formateur d’adultes, et une communauté scientifique, celle du laboratoire de recherche, le FoAP Cnam Paris. Cette double appartenance est nourrie par l’activité de recherche-partenariale-collaborative et par l’activité de recherche entre pairs au sein d’un laboratoire.
Ces diverses activités permettent de développer un travail de distanciation et participent à une dynamique de construction identitaire. En cela, nous rejoignons Dumais (2017, p. 70) lorsqu’elle souligne que ce qui fonde la posture de chercheur c’est «  sa capacité de distanciation et la centration sur son rôle d’analyste  ».

Entre engagement et distanciation

Le double concept d’engagement-distanciation de Norbert Elias (1983) pose d’emblée les deux pôles entre lesquels le chercheur et tous ceux qui vont participer à une recherche vont devoir se situer. L’engagement dans un objet de recherche est à la fois nécessaire pour y trouver un intérêt d’implication et dans le même temps doit être questionné, mis à distance, afin qu’il n’entrave pas la possibilité de découvrir ou de pouvoir accepter de «  penser contre soi » lorsque l’information nouvelle vient mettre à l’épreuve une structure de pensée préalable.

Les difficultés de distanciation sont majorées si le praticien-chercheur intervient dans une organisation dont il dépend. Il semble nécessaire de conserver un niveau d’indépendance suffisant pour être à la fois engagé et distant. Nous avons, pour notre part, cherché à conserver ce niveau d’indépendance en ne dépendant pas des établissements dans lesquels nous intervenons. Toutefois, il existe toujours un certain niveau de dépendance qui va se jouer dans la relation du prestataire qui négocie le prix de ses interventions. Le commanditaire de la recherche cherche d’une manière ou d’une autre à conserver un contrôle sur ce qu’il finance. Les finalités poursuivies, par le praticien-chercheur et par l’organisation commanditaire n’étant pas toujours du même ordre.
Le travail de distanciation n’est pas accompli par le fait de dépendre plus ou moins à un champ social, il relève d’une activité continue qui se rejoue dans chaque contexte de recherche et tout au long du processus. Tout l’appareillage conceptuel, méthodologique, technique, mobilisé dans une démarche de recherche, toutes les compétences développées par le praticien-chercheur participent du travail de distanciation. La posture de sérendipité, accepter de penser contre soi, la procédure par itération, le raisonnement circulaire et la méthode de comparaison continue (Glaser & Strauss, 2010) aident au cheminement de mise à distance.

Nous voudrions apporter une ficelle supplémentaire à la panoplie du chercheur, la dynamique d’ajustement postural comme source d’apprentissage et aide au positionnement.

Utiliser les variations de postures comme aide à la distanciation

« En sociologie, tout est question de dosage et d’évaluation des risques encourus par le sociologue lorsqu’il répond à la demande sociale ou lorsqu’il est sollicité au titre d’expert » (Paugam, 2010, p. 440) La posture choisie sert de cap, mais elle est soumise dans l’approche empirique à des tensions qui vont la faire osciller vers d’autres positions.

Une réflexion ancrée

Nous prendrons appui sur deux recherches partenariales et collaboratives pour rendre compte de l’observation des variations de positions, leur identification et leurs effets. Nous proposerons l’explicitation d’une approche méthodologique pour en faire un outil supplémentaire à l’apprentissage du métier de chercheur et tenteront d’envisager sa transposition à la formation à d’autres métiers.

Recherches partenariales et collaboratives

L’exemple de deux groupes de recherche :
• Le premier réunit un groupe de formateurs de professionnels de santé
• Le second un groupe de professionnels paramédicaux
La démarche de recherche proposée aux deux groupes est similaire et les objets de recherche différents. Nous présenterons succinctement les objets de recherche pour nous centrer sur la question des variations de positions ainsi que sur le développement d’une pratique de la dynamique d’ajustement postural et de ses effets. Pour cela, nous préciserons les conditions de la recherche, les modalités de transactions et illustrerons par des extraits de verbatim.

La première recherche

De 2017 à début 2020, le groupe de recherche a bénéficié d’une large marge d’autonomie soutenue par la direction de leur établissement. Celui-ci souhaitait développer les activités de recherche et notamment chez les formateurs des professionnels de santé. Ce soutien institutionnel a favorisé le développement de la recherche et des communications nationales et internationales. Dans ce cas, nous considérons que nous entretenons une relation de partenariat où se construit de manière négociée une action commune. Notre rôle consiste alors à accompagner le groupe de recherche dans une reconnaissance réciproque et où se conjuguent incertitude, confiance et engagement. Mais la position de partenaire n’est pas la seule présente. Elle se conjugue de manière hybride avec celle de chercheur, de consultant, de formateur, de prestataire, d’expert mais parfois également d’usager, de militant, de clinicien.
Nous identifierons ces différentes postures, les observerons et chercherons à en comprendre les effets sur plusieurs plans.

La seconde recherche

La seconde recherche qui nous servira à travailler notre expérience, concerne un groupe de professionnels paramédicaux. La recherche en cours, a débuté en 2019 se poursuit en 2021.
Contrairement au premier groupe, celui-ci est sous étroite surveillance institutionnelle. De multiples contrôles sont mis en place par la direction de l’établissement, au point où la recherche aurait pu très vite s’arrêter. Les procédures de contrôle mise en place produisent alors un désengagement chez les membres du groupe. Nous pouvons dès lors considérer que la direction de cet établissement qui a à la fois, un discours de valorisation et de développement de la recherche, adopte une posture de contrôle.
Celle-ci tend à diminuer la marge d’autonomie nécessaire au développement d’une démarche de recherche où l’incertitude est nécessairement présente. La démarche d’une recherche qualitative qui leur est proposée s’inscrit dans une logique itérative, circulaire ou hélicoïdale et non séquentielle. La posture de contrôle crée alors une tension qui interroge la posture du chercheur. Celle-ci est tirée vers la position de prestataire plus que de partenaire.

Une dynamique source d’apprentissage

La dynamique d’ajustement postural

• Aide à la distanciation
• Source d’apprentissage
• Participe à la dynamique de construction identitaire du chercheur
Cette dynamique faite de rupture, d’équilibre, de prise de conscience, de recentrage constitue un fil conducteur dans l’évolution de la position qu’occupe le chercheur au regard de ses objets.
Cette variation de postures, choisi ou non, vient questionner la relation qu’entretient le chercheur avec ses interlocuteurs, notamment lorsqu’il s’agit de recherche participative.

Nous illustrerons et soumettrons au débat l’idée que le repérage des variations de positions produit des changements d’habitude d’activité et participe à notre dynamique de construction identitaire.

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