Un article repris du Campus de la Transition, une publication sous licence CC by sa
Vous avez dit low-tech ?
Réinventer les imaginaires
Face à l’urgence environnementale, plusieurs grands récits irriguent les imaginaires collectifs. La croyance en un monde dans lequel la technologie, qu’elle soit high-tech ou green-tech, viendra résoudre tous les problèmes, s’oppose au récit d’un système courant à son effondrement et poussant l’homme à s’autonomiser et à lutter pour sa survie.
Le Campus de la Transition défend un autre récit ! Nous avons la conviction qu’une résilience collective est possible, avec la mise en commun des ressources et de leur gestion, la réappropriation technique et la relocalisation de la production de biens et services fondamentaux.
Face à la perspective d’un avenir condamné, les low-tech permettent à chacun d’entre nous d’agir et de dessiner un chemin qui, en de multiples lieux, fait ré-émerger des organisations porteuses de sens, autonomes et durables. En distinguant parmi les innovations technologiques, celles qui rendent l’être humain plus libre de celles qui le fragilisent, les low-tech réinterrogent ainsi en profondeur le lien entre écologie et technologie.
Davantage de sobriété mais aussi plus de convivialité
Concrètement, les low-tech qualifient des pratiques, savoir-faire, ou encore modes de vie à la fois utiles, accessibles à tous et consommant peu de ressources finies. Elles visent à répondre à nos besoins (se chauffer, se déplacer, se nourrir, jouer, apprendre, …) en s’appuyant sur des technologies simples, solides et sobres, et permettant de consommer moins de matériaux complexes, gourmands en ressources et en énergie. Les chaînes logistiques sont plus courtes, les objets plus faciles à fabriquer, à prendre en main et à réparer. Les externalités négatives sont limitées et l’empreinte environnementale réduite.
Les low-tech constituent ainsi de facto un chemin de résilience et de régénération de nos écosystèmes. Prenant le contre-pied des high-tech et de la course à l’innovation, la démarche low-tech vient remettre à l’honneur le bricolage et favoriser les matériaux recyclés pour préserver les métaux rares. Elle s’oppose aux valeurs de performance, de sophistication technique et de surabondance pour y substituer celles de robustesse et de réparabilité, mais aussi de transparence, de juste besoin, et de saine frugalité.
Cet autre mode de vie, plus durable et soutenable, que propose la démarche low-tech, est aussi un mode de vie désirable et convivial ! Privilégier les technologies simples, voire les non technologies quand cela est possible, c’est aussi développer un autre rapport aux objets, qui soit plus autonome et créatif.
« Il est bien plus facile de passer à la civilisation du vélo que de déployer la voiture électrique ou d’inventer une voiture propre qui restera toujours un oxymore. Non seulement c’est plus simple, mais ce serait sans doute aussi beaucoup plus sympa »
Philippe Bihouix, ingénieur centralien et auteur de L’Âge des low-tech : vers une civilisation techniquement soutenable (Seuil, 2014).
2018 – 2020 : des expérimentations concrètes et “organiques” sur le site de Forges
Depuis l’installation du Campus de la Transition en 2018 sur le site de Forges, les low-tech sont un sujet quotidien pour l’écolieu. Comment faire vivre le site sans utiliser des systèmes techniques complexes qui augmentent notre dépendance à la technologie et rendent difficile une trajectoire carbone soutenable ? Mais aussi comment construire un récit désirable autour des low-tech pour donner envie à chacun d’agir collectivement pour ce mode de vie plus soutenable ?
C’est inscrit dans son ADN : le Campus est un lieu créé pour expérimenter des solutions alternatives. A titre d’exemples, nos moutons tondent la prairie du château de manière naturelle. Le second étage vient d’être isolé à l’aide de matériaux biosourcés. En hiver, plutôt que de chauffer des espaces, nous veillons à réchauffer les personnes, à l’aide de bouillottes par exemple. Et lorsque le froid se fait trop intense, nous choisissons de chauffer des pièces communes en dédiant une pièce aux activités silencieuses (lecture, travail…) et une autre aux échanges (discussion, atelier, projection-débat de films, jeux de société…). Cela permet ainsi de concentrer la chaleur, d’avoir des espaces confortables et de favoriser la convivialité et le partage !
2020 – 2021 : généraliser et essaimer la démarche avec le projet ORFEE, en partenariat avec l’ADEME
Mise en place de manière spontanée et organique, cette première démarche low-tech n’a pas fait l’objet de généralisation ni d’analyse, permettant notamment de mieux comprendre les succès et échecs de ces expérimentations.
Le Campus de la Transition souhaite désormais aller un cran plus loin et généraliser cette démarche low-tech sur son site pour pouvoir ensuite l’essaimer auprès des acteurs de son écosystème (les étudiants, le réseau des Oasis, l’écosystème low-tech).
Pour nous donner les moyens de cette ambition, nous avons répondu au mois de mai 2020 à l’Appel à Manifestation d’Intérêt « Vers une innovation low-tech en Île de France » lancé par l’Ademe (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie). Le projet ORFEE Low Tech, proposé par le Campus de la Transition, fait partie des 11 lauréats de cet AMI.
« Il s’agit de réfléchir de manière plus systémique aux objets et techniques dont nous avons vraiment besoin sur le Campus, ainsi qu’à leurs usages, qu’il soit question de mobilité, de bâtiment, d’usage de l’eau, de gestion des déchets, d’outils numériques ou d’alimentation”, explique Florence Drouet, cheffe du projet ORFEE. “Nous développerons ensuite des dispositifs qui serviront également à former nos stagiaires mais aussi les accompagnateurs low-tech des collectivités locales, en partenariat avec l’association OseOns. »
La méthode ORFEE : “Observer, Réaliser, Former, Éclairer et Essaimer les Low-Tech”
Projet ORFEE low tech
Le projet ORFEE vise à déployer une démarche low-tech sur le site du Domaine de Forges où est basé le Campus de la Transition, mais aussi à recueillir des données permettant d’enrichir et de documenter les pratiques du Campus comme celles d’autres d’autres écolieux, vers plus de soutenabilité.
Il se décline selon la méthodologie suivante :
– OBSERVER : Il s’agit de dresser un bilan des consommations de ressources et des pratiques low-tech du Campus ainsi qu’une bibliographie des usages low-tech envisageables à mettre en place au Campus. Cette phase mettra ainsi en lumière les freins et leviers vis-à-vis de l’appropriation des low-tech.
– RÉALISER : Une concertation en design thinking avec toutes les personnes du Campus déterminera quels dispositifs seront mis en place sur le Campus dans un ou plusieurs des domaines suivants : mobilité, systèmes énergétiques, numérique, alimentation, gestion de l’eau, etc.
– FORMER : La transmission des résultats de nos projets de recherche-action est au cœur de notre démarche ! Des modules pratiques avec un atelier low-tech intégreront notre offre de formations pour les étudiants de l’enseignement supérieur et les professionnels souhaitant intégrer les enjeux de transition dans leurs pratiques et leur organisation. Ce sera aussi l’opportunité de questionner le rapport de l’homme à la technique.
– ÉCLAIRER : Les résultats de nos travaux seront publiés, et nos pratiques diffusées auprès des acteurs du territoire, via le réseau Oasis par exemple ou lors de nos Journées découvertes.
Par ailleurs, la mise en récit de notre expérience via la création d’un spectacle vivant (en partenariat avec le théâtre de la Tête Noire) et l’appel au sensible et à l’imaginaire, permettra de transmettre le vécu de cette démarche et et de sensibiliser un large public (scolaires, associations, …).
– ESSAIMER : Nous souhaitons que notre écosystème puisse bénéficier de nos apprentissages et expérimentations. Pour ce faire, nous prévoyons l’organisation de moments d’échange avec, entre autres, l’accueil de la Semaine des Alternatives Low Tech, la SALT, en avril 2021 et la mise en open source de nos prototypes.
Pour favoriser les échanges avec le territoire, nous envisageons la création d’un atelier bricolage ouvert à tous et l’organisation de Rencontres de Forges sur ce thème en partenariat avec la mairie de Forges et la Communauté de Communes du Pays de Montereau.
Ils nous soutiennent
Notre premier soutien est l’Ademe Île-de-France (AMI Vers une innovation « low-tech » en Ile-de-France – Ed. 2020. Pour une transformation systémique des territoires)
D’autres organismes – institutionnels, associatifs engagés et culturels – sont également partenaires du projet ORFEE :
– La commune de Forges
– L’association OseOns
– Le mouvement Ingénieurs Engagés
– L’ISIGE Mines ParisTech
- Le théâtre de la Tête Noire
– L’ONG 0.6 planet
Revue de presse : les médias en parlent
– “L’archipel low-tech en France illustré”, Low-Tech Lab, 14 décembre 2020
– “Orfee low-tech : imaginer les outils de la transition”, Le Journal du Grand Paris, hors-série “L’Île-de-France en mode résilience”, octobre 2020.
– “Innovations « low-tech » : l’Ademe Île-de-France retient onze projets”, Actu-Environnement, 30 septembre 2020
Pour en savoir plus :
contact@campus-transition.org
Répondre à cet article
Suivre les commentaires : |