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Pourquoi les jeux vidéo peuvent nous apprendre à gérer les crises

Un article repris de https://theconversation.com/pourquo...

Plusieurs jeux vidéo simulent des pandémies et les mécanismes qui favorisent leur propagation. wallup.net

Les crises sont des événements rares, imprévisibles et uniques. Elles sont de nature, d’intensité, de durée et d’étendue différentes. Elles se déroulent à des époques où les technologies, les ressources, les sociétés et les pratiques ne sont pas les mêmes. Au cours d’une crise, les pouvoirs publics et les organisations doivent faire face à des situations et à des phénomènes tellement imprévisibles et extraordinaires qu’ils ne peuvent être affrontés en appliquant des méthodes classiques de gestion des risques. La gestion de crise de s’improvise pas. Elle nécessite des connaissances, des compétences et des talents spécifiques.

La pandémie mondiale du Covid-19 a révélé certaines lacunes dans le domaine de la gestion de crise, aussi bien chez les managers que chez les politiques. Pourtant, d’autres pandémies se sont produites et l’étude de ces crises sanitaires passées permet d’établir des bonnes et des mauvaises pratiques. En s’appuyant sur l’expertise des chercheurs et des historiens, grâce au benchmarking et à la gestion des connaissances, il est possible de développer des formations destinées à apprendre comment gérer une crise. L’utilisation simultanée de la scénarisation et de la gamification rend ces formations à la fois plus divertissantes et plus performantes.

Coronavirus : la crise économique est unique, voici pourquoi.

Scénarisation et gamification pour aider la décision

L’utilisation conjointe de scénarios alternatifs et de simulations numériques dans le management de crise et l’aide à la décision en situation extrême n’est pas nouvelle, mais avec les progrès de l’intelligence artificielle et de l’industrie du jeu vidéo, elle prend aujourd’hui une tout autre dimension.

Une crise consiste en une succession d’événement précis qui se produit dans un contexte donné. Plus les décideurs sont capables de caractériser en détail l’événement et son contexte, plus ils peuvent prendre les bonnes décisions. Plus ces décisions sont anticipées, c’est-à-dire prises, planifiées et appliquées en amont, plus elles sont efficaces et limitent les conséquences négatives.

Les scénarios permettent de créer des situations hypothétiques probables en intégrant des éléments prévisibles et imprévisibles dans un déroulement à la fois chaotique et plausible. Il ne s’agit en aucun cas de faire des prédictions et d’appliquer des méthodes toutes faites. Il faut au contraire créer de nouvelles méthodes en s’inspirant des bonnes pratiques et en étant attentif aux signaux émis par l’environnement.

Chaque décision entraîne les conséquences associées, bonnes ou mauvaises, et de choix en choix, la situation s’améliore ou se détériore. Les capacités d’anticipation, d’adaptation, de planification, de coordination et de gestion des ressources sont fondamentales dans la résilience individuelle et collective face à l’hostilité et l’instabilité environnementale.

Les systèmes de gestion de crises (Crisis Management Systems, CMSs) peuvent être gamifiés pour que les acteurs impliqués s’entraînent à gérer des fausses crises sur la même plate-forme que celles qu’ils utiliseront pour gérer les vraies.

La gamification des formations avec Gamelearn.

Intégrée dans un espace vidéo ludique, chaque étape de la gestion de crise devient comme le niveau d’un jeu qu’il faut réussir en obtenant le maximum de points pour ensuite passer à un niveau plus difficile. Les joueurs maîtriseront alors totalement la technologie et les différentes fonctionnalités du système, ce qui les rendra plus précis et agiles. Ils pourront également vivre une expérience sociale et résoudre des problèmes de manière collaborative.

L’edutainment pour se former à la gestion de crise

L’edutainment, combinaison des mots anglais education et entertainment, consiste à s’amuser en apprenant. Ainsi, les serious games, sont des jeux destinés à atteindre un objectif sérieux via une activité ludique. Ils peuvent être utilisés pour simuler virtuellement autant de fois que nécessaire des situations extrêmes qu’on ne peut pas créer réellement, comme un crash d’avion, une explosion due à une fuite de gaz, un incident dans une centrale nucléaire, ou une contamination à un virus inconnu.

Un serious game pour éviter les erreurs médicales basé sur la sur la check-list chirurgicale de l’OMS.

Les joueurs se familiarisent ainsi avec des situations qui ne sont pas familières et se retrouvent à devoir les gérer en temps réel dans des environnements virtuels tellement réalistes qu’ils produisent une forte sensation d’urgence et de stress. Les joueurs s’habituent à rester calmes et à avoir confiance malgré ces circonstances angoissantes. Le jeu favorise l’expression et le développement d’une forme d’intelligence particulière : logique, pratique, tactique, dynamique, proactive, créative et collaborative.

Des professionnels peuvent ainsi s’immerger autant de fois que nécessaire dans ces crises que peu de personnes ont vécues et ont eu à affronter. Au cours de ces événements catastrophiques qu’ils doivent gérer, leurs comportements et leurs choix sont évalués par le système et éventuellement par des coachs experts qui les accompagnent et les guident. Les joueurs peuvent discuter les uns avec les autres, avant, pendant et après le jeu pour partager leurs impressions. Ils appliquent les enseignements théoriques et apprennent de leurs erreurs. Ils mémoriseront mieux et sauront plus facilement transposer et adapter les apprentissages du jeu dans le monde réel.

Il existe des serious games pour apprendre à gérer différentes formes de crises : des menaces sur des infrastructures critiques comme des aéroports, des gares ou des ponts ; des accidents dans des sites industriels avec des produits ou des procédés dangereux ; des attaques terroristes ou des prises d’otages ; et des dangers bactériologiques.

Présentation de TeamXp, un logiciel de formation aux crises immersif et réaliste.

Une formation plus agréable et plus performante

Le réalisme des serious games qui peuvent s’appuyer sur la 3D et la réalité virtuelle permet un transfert élevé des meilleures pratiques. Les situations rencontrées dans le jeu peuvent être associées à des événements connus ou au contraire plonger le joueur dans une situation extraordinaire qu’il n’a jamais vécue et face à laquelle il va devoir improviser. Complètement perdu, il devra alors faire preuve d’initiative et de créativité pour gagner la partie.

Les joueurs affrontent des crises virtuelles qu’ils peuvent revivre plusieurs fois en faisant des erreurs et en apprenant à leur propre rythme. S’ils se trompent, aucun manager ne viendra les critiquer. Ils peuvent même le faire volontairement simplement pour voir le résultat. Un formateur bienveillant peut fournir de l’aide et des conseils. Les apprenants sont les véritables acteurs de leur propre formation : ils analysent leurs résultats et apprennent aussi en regardant les performances des autres joueurs. Ils peuvent demander conseil via des forums ou des réseaux sociaux dédiés.

Que ce soit dans une banque, un aéroport, une usine de produit chimique, ou une centrale énergétique, les nouveaux employés n’auront pas d’expérience d’une crise avant un certain temps. Au contraire, ceux qui ont plus d’ancienneté dans l’entreprise ont souvent déjà vécu des crises et sont mieux capables de les gérer. Capturer les connaissances et les pratiques spécifiques développées par ces professionnels expérimentés avant qu’ils ne partent et les transmettre aux plus novices par le biais de simulations ludiques et immersives est un moyen idéal pour d’assurer leur formation et gérer les connaissances organisationnelles.

Apprentissage de la gestion de crises et évaluation par un jeu de simulation.

L’apprentissage par le jeu vidéo peut être approfondi et rendu opérationnel en le complétant par des d’échanges, des débats et des anecdotes. Le jeu vidéo n’est qu’un outil et doit être considéré dans une approche holistique de la formation à travers laquelle les bonnes pratiques et les connaissances organisationnelles peuvent être capturées, diffusées et adoptées. Les serious games s’intègrent donc dans des programmes de formation comprenant des cours traditionnels, des jeux de rôle, des entretiens individuels et collectifs, du coaching, des analyses comparatives, des débriefings et des évaluations.

Les pratiques et les connaissances acquises grâce aux jeux vidéo doivent être transférables dans la vie réelle. Il est essentiel d’évaluer si les objectifs pédagogiques ont été atteints. Cependant, ces évaluations sont parfois difficiles et souvent négligées. Les joueurs reconnaissent certaines situations vécues dans le jeu vidéo dans leur environnement de travail et font le lien entre les pratiques virtuelles et réelles. Dédier un serious game à des situations exceptionnelles comme des crises qui ne se produisent qu’une ou deux fois dans une carrière entière peut sembler inapproprié, mais la gravité de ces événements qui peuvent être critiques requiert de former les futurs et nouveaux professionnels le plus efficacement possible.

The Conversation

Oihab Allal-Chérif ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son poste universitaire.

Licence : Pas de licence spécifique (droits par défaut)

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