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Quels usages des classements universitaires ?

Un article repris de http://theconversation.com/quels-us...

Harvard est en tête du classement de Shanghai… et d’autres. Mais ces classements ont des zones d’ombre. Angela N./Flickr, CC BY

De nombreux classements d’universités sont aujourd’hui établis par des journaux spécialisés ou des institutions académiques. Les classements de Shanghai, du Times Higher Education, de QS, du Financial Times, de RePeC, de l’Etudiant… parmi tant d’autres, informent les futurs étudiants, leurs parents, les établissements d’éducation supérieure, le personnel universitaire et les autorités publiques.

Mais restons prudents : ces classements peuvent induire en erreur, du fait de la nature même des données qu’ils utilisent et des traitements qu’ils leur appliquent.

Choisir une université

Au cours des dernières décennies, la mondialisation a entraîné une hausse de la mobilité des personnes, et plus particulièrement des étudiants. Mais il est difficile pour l’étudiant globe-trotteur de comparer simplement les apports de différentes universités, car ces dernières sont organisées et financées de diverses manières.

À cause du coût que représente la collecte des données et de la multiplicité des critères, il est très difficile d’asseoir le choix d’un établissement en particulier. En Europe, des efforts ont été faits pour harmoniser les diplômes afin de faciliter la comparaison des différentes institutions par les étudiants et de permettre à ces derniers de passer d’un programme universitaire à un autre. Mais il reste encore beaucoup de travail à accomplir. Les organismes nationaux et internationaux d’accréditation produisent des rapports détaillés, mais ces derniers sont souvent obscurs pour le non-initié.

Les classements d’universités sont plus lisibles, mais il n’est pas toujours facile de les interpréter. Les classements sont présentés comme scientifiquement exacts, mais les méthodes statistiques employées sont loin d’être robustes. Il serait plus approprié de regrouper dans des fourchettes de classement les établissements présentant des performances similaires.

Les établissements d’éducation supérieure participent en effet à des activités variées : éducation à différents niveaux de qualification et dans de nombreuses disciplines, recherches universitaires ou appliquées, services offerts par les bibliothèques, conseils d’orientation et accompagnement professionnel. Ces différentes dimensions ne sont pas toutes nécessairement présentes au sein d’un même établissement, elles ne sont pas homogènes et comparables.

Un classement unidimensionnel ne peut être le résultat que de choix subjectifs quant à l’importance de ces dimensions. Certains critères ont donc un impact plus important que d’autres.

Le sens d’un rang

Dans ces circonstances, les différences de rang dans un classement peuvent résulter de choix implicites. Ainsi, les classements ne répondent pas nécessairement aux besoins des lecteurs, dont les priorités et les intérêts peuvent différer. Ils peuvent induire en erreur.

Certains d’entre eux, par exemple, adoptent une approche générale de l’efficacité économique sans vraiment intégrer les principes économiques adaptés à la situation des établissements d’éducation supérieure, comme la théorie des clubs et du bien public local. Sur la base d’approximations fragiles, d’autres peuvent proposer des comparaisons rétrospectives de la rentabilité d’un investissement dans une formation. Ce faisant, ils ne prennent pas forcément en compte la pertinence du contenu des enseignements en relation avec les évolutions anticipées des exigences des marchés de l’emploi pour un pays donné, les salaires non perçus pendant le temps de la formation ou l’impact de la sécurité sociale sur les rémunérations.

Des données peuvent être omises, car il est difficile de se les procurer, ou parce qu’elles nécessitent des traitements trop complexes. D’autres classements évaluent la qualité scientifique d’un corps enseignant à un moment donné par des mesures résultant de processus longs et cumulatifs.

Des classements rétrospectifs et court-termistes

Bien qu’ils aient encouragé quelques établissements à investir dans des domaines négligés, les classements d’universités sont rétrospectifs et court-termistes. Ils ont tendance à être autoréalisateurs en renforçant la dimension réputationnelle sur laquelle ils reposent en grande partie.

Certains classements recueillent ainsi les avis sur la réputation des établissements, mais ces avis, formulés par des professionnels qualifiés, peuvent être construits à partir des versions antérieures desdits classements (Bastedo et Bowman, 2009 ; 2010).

Il est donc prudent d’accorder uniquement du crédit aux classements qui exposent clairement leurs a priori lorsque ces derniers sont considérés comme pertinents. Il est également plus avisé de ne pas se référer à un seul classement, mais d’en combiner plusieurs pour évaluer ces établissements sous plusieurs angles.

Les choix d’un jeune établissement

Dans ces conditions et d’un point de vue pragmatique, il est important, pour un établissement jeune, porteur d’un projet original, comme l’est TSE, de ne pas prendre en compte son rang au moment de faire ces choix ou ces investissements stratégiques. C’est le classement qui doit résulter de convictions, de valeurs et de la façon de prendre en compte l’intérêt des étudiants, et non le contraire.

Il est utile d’essayer de comprendre et d’expliquer notre rang dans un classement aux gens intéressés par notre projet en relation avec les objectifs de notre institution. Ce n’est pas toujours possible et cela reste coûteux. Rejoindre les rangs d’un établissement d’éducation supérieure doit par-dessus tout être une expérience intellectuelle unique, qui enrichit et enrichira nos vies par les rencontres qu’elle permet, les savoirs qui nous sont enseignés, les valeurs qui nous sont inculquées.

The Conversation

Stéphane Gregoir est Doyen de Toulouse School of Economics

Licence : CC by-nc-nd

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